Un rappel du terrorisme d'Etat ?
Philippe Brindet
26/02/2008


Un mouvement d'idées inquiétant pour l'avenir des civilisations pare des couleurs de la vertu et du bien Robespierre et la Terreur. Un tel mouvement stupéfie bien des gens (voir Alain-Gérard Slama, "Le retour du ressentiment" paru dans Le Figaro du 25 février 2008) devant ce que l'on prend comme une mise en cause des bienfaits de la démocratie.

Malheureusement, la société des humains a, dans de nombreuses régions, établie une conception dictatoriale de l'Etat, dissimulant généralement cette situation en multipliant les étiquettes. Libéralisme, capitalisme, social-démocratie, économie sociale de marché, et combien d'autres. Ces étiquettes sont commentées, expliquées et imposées à longueur de temps et de supports promotionnels dans l'enseignement, la pseudo-culture, les religions.

Partout, l'"Etat de droit" règne en maître absolu. La plupart des humains se trouvent bienheureux de vivre sous la férule de la police et des juges, entre prisons et villages de vacances, cités putrides et loisirs de pacotille.

Dans cette dictature des "bonnes manières", depuis la chute de l'"espérance communiste", certains clercs agitent un spectre bicentenaire qu'ils parent des lampions de fêtes révolutionnaires. Pour certains, comme Alain Badiou ou Slavoj Sziszek, la terreur jacobine est ainsi devenue le "salut d'un monde confronté aux problèmes sociaux ou écologiques".

Quand on leur demande s'ils sont effrayés du sang et des larmes que le régime de la Terreur apporte immanquablement, ils répondent, d'un air patelin et le sourire entendu, que le capitalisme et le libéralisme sont responsables de drames incomparablement plus terribles que les exécutions en masse. Si l'on fait mine de s'étonner d'une telle opinion, ils expliquent que les exactions du libéralisme sont des facteurs d'oppression et d'aliénation, tandis que la Terreur vise entièrement à l'émancipation du genre humain.

Pourtant, l'appel au terrorisme comme sauvegarde de la démocratie avait été dénoncé par Raymond Aron, dans "Démocratie et Totalitarisme", Folio Essais, Gallimard 1965, et plus que lui encore, par Jean-Louis Talmon dans "Les Origines de la démocratie totalitaire", trad. P. Para, Calmann-Lévy, 1966.

A l'inverse, Maurice Merleau-Ponty en 1947, dans "Humanisme et Terreur" revendiquait le droit de l'Etat à la Terreur dans sa défense des méthodes staliniennes et avec lui, son affidé, Jean-Paul Sartre et leurs élèves, Pol Pot et Khieu Samphan. Les clercs s'égarent souvent et ils sont toujours les initiateurs de la Terreur qu'exécutent leurs lecteurs bernés.

Pourtant, de nombreux contempteurs de la Terreur démocratique réfèrent aux Lumières qu'ils prétendent "émancipatrices du genre humain", à la suite du Kant de "Qu'est-ce que les Lumières ?". C'est le cas à longueur d'articles pour des hommes comme A.G. Slama, qui ne voient pas que la démarche émancipatrice des Lumières est également invoquée par les terroristes.