Après une époque de clergé démocrate,
clergé tant décrié par les intégristes de droite, nous sommes insidieusement
passés à une période de clergé jacobin.
Le curé démocrate du passé déduisait du devoir d'amour pour tous les hommes,
dogmatiquement défini par le Concile Vatican II, que la démocratie était
le meilleur des régimes politiques et que l'Eglise devait s'en inspirer sans
aucune réserve. C'était à la fois très vague (quelle démocratie ? les curés
démocrates devaient préciser qu'il s'agissait d'une démocratie de type marxiste,
mais ils devaient tirer sur la description peu convaincante d'un communisme
primitif décrit dans quatre versets des Actes des Apôtres, ce qui est peu)
et très précis, parce que sans citer aucun passage des Constitutions concilaires,
la référence au "Concile" marquait simplement le fait qu'il existait une
Eglise révolue d'avant et une Eglise démocrate d'après. C'était simplement
donner raison à Loisy, Montalembert, Grégoire et Talleyrand. Un tout petit
peu décevant ...
Aujourd'hui, le curé jacobin s'est construit par une lente maturation et
suit l'évolution de la plupart des intellectuels de gauche, en France au
moins. On retrouve la même évolution chez les anciens communistes des pays
du Bloc soviétique. Orphelins des marxisme-léninismes de type soviétique
ou de type chinois, ils sont retournés aux sources : le jacobinisme terroriste
de 1793, opposé au constitutionalisme bourgeois libéral de 1789. Parmi les
intellectuels théoriciens de ce retour à Robespierre et Saint-Just, on citera
le français Alain Badiou, et en Yougoslavie, Lazlo Ziszeck, ce dernier résident
en France. Pour trouver des illustrations du curé jacobin, on pourra se référer
à trois publications : Témoignage Chrétien, Golias et Le Parvis.
Dans une homélie du Dimanche 20 juillet dans une église baroque de Haute-Savoie,
on pouvait entendre du curé jacobin de service l'affirmation suivante :
"Le Royaume des cieux, c'est ce vieux rêve d'égalité, de liberté et de fraternité
pour tous les hommes parce qu'ils sont aimés par le Christ."
S'y ajoutait un appel "vibrant" à renoncer aux exclusions, aux accusations
vaines puisque nous sommes tous des frères libres et égaux. Catholiques de
tous les pays, taisez-vous, ne contestez pas votre curé, circulez.
Notons que l'affirmation sur le Royaume des Cieux se lit à l'identique chez
Lacordaire et chez Renan au XIX° siècle. Elle se lisait, plus dramatiquement
chez les curés jureurs de 1793 comme Joseph Lebon, le bourreau d'Arras. Il
s'agit d'une constante bicentenaire dans le clergé catholique : il suffit
d'éradiquer ceux qui sont moins frères que les autres, les fameux ennemis
du peuple, pour que les survivants soient tous des frères libres et égaux.
Et des frères, il y en aura toujours assez.
On se pose la question de savoir comment de telles balivernes peuvent-elles
être prononcées devant deux cent personnes, membres de la bourgeoisie moyenne
supérieure, passant ses vacances avec un budget hebdomadaire moyen supérieur
à deux fois le SMIC mensuel. Parmi ces deux cent personnes, se trouvaient
un nombre important, supérieur au tiers, de vieillards ayant dépassé soixante-dix
ans, rescapés de la Seconde Guerre mondiale ..., mais aussi une dizaine d'enfants
en bas âge. Aucun jeune entre 12 et 30 ans. Absents, éradiqués, avortés ...
Revenons sur le terme de balivernes utilisé pour qualifier le sermon du curé
jacobin. Balivernes parce qu'aucun individu ayant acquis un niveau de connaissances,
même élémentaires, ne peut prendre au sérieux une "religion" jacobine. Ces
bigoteries d'assassin devraient faire horreur à toute personne de bon sens.
Et pourtant, il n'en est rien. L'auteur de ces lignes est le seul à être
sorti pour terminer la séance en perfusion sur la terrasse d'une brasserie
voisine. Et pour jouir du spectacle de deux cent catholiques se ruant à la
sortie pour faire la queue chez le pâtissier voisin. Comme si de rien n'était
depuis deux siècles. Pendant que je crevais de colère et de honte.
Balivernes quand le jacobinisme est en cause ?
Le jacobinisme présente deux dangers : l'Etat et la guillotine. Tant qu'on
ne rapproche pas ces deux horreurs l'une de l'autre, le jacobinisme est une
ridicule élucubration de malades pervers. Par ailleurs, il faut souligner
une différence essentielle entre le démocratisme, plutôt "libéral", du jacobinisme
terroriste. Le démocrate et le jacobin invoquent tous deux un "dieu trine",
aux noms de la Liberté, de l'Egalité et de la Fraternité. Mais, le démocrate
réserve cette infernale trinité à un "Homme" purement théorique. Dans la
pratique, le démocrate est pour la propriété privée, la "récompense" des
mérites. Bref en un mot, pour l'oppression des classes inférieures par l'élite
et les possédants. Le fait que les deux tiers de la population en France
se trouvent en économie de survivance l'indiffère absolument. Le bon démocrate
se trouve, lui, dans le bon troisième tiers. Par contre, le tsunami à vingt
mille kilomètres de chez lui l'meuvent au plus haut point.
A la différence du démocrate, le jacobin est un homme pratique qui s'encombre
peu de théorie, sauf dans la phase, que l'on souhaite aussi longue et prolongée
que possible, de la verbalisation de son fantasme. Pendant cette phase de
verbalisation, il lui est très facile de se cacher dans le démocratisme du
passé. Mais, l'Histoire montre que le jacobin a une visée pratique extrêmement
précise : éliminer les ennemis de la liberté selon le vieux principe "pas
de liberté pour les ennemis de la liberté". Lorsque le jacobinisme rencontre
l'Etat et la guillotine, le sang coule à flots.
Les "braves" paroissiens en vacances du vicaire savoyard de service ne liront
bien entendu jamais ces lignes. Mais ils seraient bien étonnés de ce qu'ils
qualifieraient d'outrances. L'homme à qui ses paroles valent ce vengeur commentaire
était un homme de plus de soixante ans aux cheveux gris, lunettes, avec cet
air de plaisir et de contentement de soi qui exige une longue méditation
sur ses propres mérites. Une nourriture saine, des plaisirs simples et voilà
le curé jacobin parfait. Le curé jacobin est toujours environné d'accortes
quinquagénaires, aux petits soins pour lui, à sa dévotion pourrait-on dire
si on ne se méprenait pas sur le terme. Il n'aura jamais cet air de chat
qui boit du vinaigre que Pétion disait de Robespierre. En un mot, le curé
jacobin est un brave homme qui ressemble à ses paroissiens, ravis de lui
serrer la main à l'entrée et à la sortie du lieu où il a officié.
Plus encore, le curé jacobin n'utilise que des images que les paroissiens
ont ingérées à la messe, à la télévision, à la radio. Le sermon du curé,
le paroissien l'a déjà lu cent fois dans les journaux et les revues de la
grosse presse. Le paroissien n'a jamais rien lu d'autre, ne connaît rien
d'autre. Si par "malheur", le discours chrétien authentique lui tombe sous
les yeux, il ne voit aucune différence avec le discours jacobin ambiant parce
que le paroissien n'a pas les moyens intellectuels de déceler la déviation
des idées de cette doctrine qu'a opéré le curé jacobin.
C'est là la très grande faiblesse de l'enseignement en "paraboles" qui est
le fond du Nouveau Testament et donc du christianisme. La parabole se retourne.
Pire encore. En droit, la parabole ne se sépare pas de tout un environnement
biblique et catéchétique. Or, l'application satanique du Concile Vatican
II a éliminé l'enseignement de la science sacrée même aux plus observants
des paroissiens. Par exemple, l'immense majorité des catholiques est persuadée
que tous les hommes sont "fils de Dieu", alors que le Concile Vatican II,
à la suite de la Tradition de l'Eglise, affirme que sont "fils de Dieu" les
seuls baptisés. Les chrétiens sont, dans leur immense majorité, persuadés
que tout homme peut atteindre le Ciel, alors que dans les textes mêmes de
Vatican II, seuls les communiants ont part à la Vie Eternelle.
Un fois coupé des racines de connaissance, le paroissien est une proie facile
pour le curé jacobin qui utilise alors toutes les ressources que la société
met à sa disposition pour pervertir la science chrétien.
Ainsi, lors du même office, le curé jacobin a récité une "Préface" de fantaisie
qui rejette la guerre et les ennemis de la paix. On se serait cru à la Conférence
mondiale pour la Paix de 1949 à Wroclav.
Il n'est plus possible d'imaginer une transformation de l'Eglise qui ne passe
par l'élimination du clergé français. Les jeunes prêtres, sélectionnés par
ce clergé moribond, sauront-ils se révolter contre leurs maîtres déments
?
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