Sur André Comte-Sponville 'Du corps' et compte-rendu d'entretien sur France Culture du 28 janvier 2009
Philippe Brindet
28 janvier 2009
Sur France Culture, ce jour, le philosophe André Comte-Sponville était invité à l'occasion de la parution de son livre "Du corps".

ACS souligne qu'il est un athée, matérialiste, républicain laïque.

L'édifice dogmatique qui fonde sa philosophie est composé d'un quatuor formé de Epicure, Spinoza, Marx et Freud. Mais, lors de ses premiers cours comme enseignant à la Sorbonne, il est devenu moins dogmatique à cause de Montaigne et de Pascal.

Ainsi, sa position sur une philosophie de l'homme est que l'âme et le corps ne désignent qu'une seule et même réalité, ce qu'il tire de Spinoza, et qu'il n'y a aucune réalité "dans les cieux". Il ne reste plus sur la position du matérialisme strict, notamment à cause de l'analyse du corps en corps-sujet et en corps-objet.

Sur la question de savoir comment son matérialisme se rencontre dans le Comité National d'éthique qui est engagé dans un débat sur la révision-évaluation des lois de bio-éthique, avec des religieux, comme les catholiques que Benoît XVI vient d'enseigner par l'Instruction "Dignitatis " et qui n'ont pas du tout sa position ACS répond deux choses.

La première chose de ACS, c'est que la République n'a ni philosophie, ni métaphysique. Il en résulte que sur les questions de philosophie et de métaphysique, la République n'a aucune position et que chacun est libre de ses propres positions. La seconde chose de ACS, c'est que la République est laïque, c'est-à-dire que les religieux, membres du CNE, doivent relire l'enseignement de Benoît XVI, qui est un discours anti-républicain, de façon à porter cette parole qui, dans la République, n'a aucune autorité et ne peut pas être reçue, sous une forme républicaine. Il faut donc que les catholiques du CNE trouvent une expression de la position de Benoît XVI qui soit laïque, c'est-à-dire conforme à la position républicaine qui n'a ni philosophie, ni métaphysique.

Le politologue Alain-Gérard Slama intervenait alors pour noter que, pas plus au CNE, dont il est membre lui aussi, qu'ailleurs, il n'avait jamais eu l'impression que quelqu'un ait changé d'avis à cause de sa parole. Il rappelle la position du Président Sarkozy sur les conseils qui le laissent "de marbre". "Dites ce que vous voulez, je ferais ce qui me plaît ..."

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N'est-ce pas exactement ce que pense ACS de l'expression de l'opinion des catholiques en particulier et des religieux en général, relativement à la position républicaine qu'il pense incarner ?

Ce qui est étonnant dans la position de ACS, c'est qu'il puisse sans sourciller affirmer que son opinion personnelle est simplement conforme à la voix de la République. Or sa position étant matérialiste est essentiellement philosophique. C'est même sa profession. Et il n'a pas craint d'affirmer que la République n'avait pas de philosophie. C'est un peu paradoxal.

On peut aussi s'étonner de l'inquiétante réduction de la philosophie de ACS condamnée à se limiter à n'être que conformisme à la République laïque, cette institution de banquiers, de boutiquiers et d'assassins en hermine pourpre. Le philosophe est pourtant réputé porter son esprit dans des espaces bien supérieurs.

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On s'nterroge aussi sur l'opinion de ACS des catholiques, membres ou non du CNE, qui auraient comme mission de "convertir" Benoît XVI à la médiocrité républicaine laïque. On peut se demander si la position des interlocuteurs catholiques qu'ACS a eu l'occasion de rencontrer, peut-être au CNE, lui ait ismpirer cette opinion. C'est très regrettable.

Mais quand on y réfléchit, ne voit-on pas que si c'était réellement la position des catholiques du CNE, ils ne feraient que reproduire la position imposée en 1791 dans la Constitution Civile du Clergé. Ce que ACS "invente" ici, c'est tout simplement une traduction moderne du serment civique exigé des prêtres de l'Eglise Constitutionnelle.

L'Histoire a de ces ratés ...

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AMAZON fournit ces informations sur l'ouvrage de ACS, "Du corps" :

Présentation de l'éditeur
Ce texte, André Comte-Sponville l'a conçu quand il avait 26 ans et ne l'avait depuis jamais donné à publier. Il trouve donc seulement aujourd'hui la forme d'un livre, précédé d'une ample préface où l'auteur en restitue la génèse. L'oeuvre est une méditation de jeunesse. Elle se présente à bien des égards comme un exercice d'admiration (Montaigne et Pascal, Épicure et Lucrèce, Spinoza et Descartes, Marx et Freud...) mais relève aussi d'une déprise radicale d'avec la modernité littéraire et intellectuelle (Foucault, Deleuze, Barthes, Derrida...). Une douzaine de sections aborde quelques grands thèmes philosophiques, l'art, la liberté, la vérité, la religion..., dans un style libre et concis, proche de l'aphorisme qui fascinait déjà le jeune écrivain. Vingt-huit ans plus tard, l'auteur a à peine révisé son manuscrit. Il lui reconnaît un caractère certes juvénile et imparfait mais en endosse la paternité avec le regard mûr de l'homme accompli. 'Il faut savoir penser contre son temps' : telle était déjà la ligne de conduite que s'était fixé l'écrivain au sortir de Normale Sup. En faisant paraître ce texte aujourd'hui, il n'y déroge pas.

Biographie de l'auteur
André COMTE SPONVILLE, philosophe et écrivain, est l'auteur de nombreux ouvrages dont certains dans la collection Perspectives critiques, en particulier Petit traité des grandes vertus (5e éd.), qui l'a lancé sur la scène philosophique française et internationale.

Détails sur le produit
* Broché: 256 pages * Editeur : Presses Universitaires de France - PUF (28 janvier 2009) * Collection : Perspectives critiques * Langue : Français * ISBN-10: 2130574211 * ISBN-13: 978-2130574217