La presse, une nouvelle Curie ?
Philippe Brindet
16 février 2009


Depuis l'affaire Williamson, la presse semble avoir décidé de prendre le contrôle des affaires du Saint-Siège. Taxé d'incompétence, de sénilité, de complicité, de crime, et de que sais-je encore, le Pape est sommé d'exécuter des actes de gouvernement par la Presse, et enfin de démissionner pour raison de sénilité. Parmi les attaques les plus bestiales, on peut attribuer la palme d'infamie à un journaliste, écrivant dans l'un des quatre quotidiens nationaux en France, atteint lui-même depuis longtemps par la limite d'âge d'ailleurs, et qui doit une grande partie de sa carrière au fait que, selon Wikipédia, il est fils et petit-fils de notables enrichis dans le commerce du vin. Tout ceci le qualifie particulièrement pour donner des leçons de maintien au Pape qui, lui, est le fils d'une cuisinière d'auberge.

On apprend avec peine en lisant le quotidien du sbire en question que l'évêque autrichien, rejeté par le clergé pour des raisons de défaut de correction politique, venait d'obtenir la résignation de sa nomination.

Les hurlements frénétiques des médias, qui remplacent avantageusement les hordes de "braves gens" manipulés par les anti-cléricaux, façon "1789" ou "1870", seront donc finalement parvenus à obtenir un repli tactique de Benoît XVI sur de nombreux points. Les intégristes se trouvent dans une situation difficile entre l'amorce d'un dialogue de réconciliation avec Rome et ... le néant, et les fidèles au Pape qui voulaient suivre la voie de la réforme esquissée par Benoît XVI qui se voient contraints à rentrer dans les rangs contrôlés par la faction progressiste des anti-cléricaux.

On aura noté le poids particulièrement important dans la tempête contre le Saint-Siège de la revue allemande Der Spiegel, entraînée dans une opération ténébreuse par plusieurs de ses journalistes spécialisés dans les matières religieuses. Ces individus entretiennent tous des liens avec des organisations mixtes de catholiques progressistes et de protestants, attachés à la disparition de la Papauté.

On aura noté l'improbable rencontre entre l'affaire Williamson et la levée des effets du décret d'excommunication des évêques lefebvriens. Cette affaire Williamson n'est dans le fond que la délation par la presse d'une apologie de crime, provoquée et diffusée par la télévision publique d'un Etat dans lequel le protestantisme est religion d'Etat, cette religion s'entendant essentiellement de l'anti-papisme, même si la faiblesse contemporaine de cette institution a conduit beaucoup de luthériens à appliquer leurs efforts à d'autres sujets plus productifs.

Il faut se souvenir que Saint Pie VI est mort d'épuisement entre les mains des soldats de la Révolution française lors de sa déportation il y a à peine plus de deux siècles, Rome ayant été conquise et pillée par les Jacobins. Son successeur, Pie VII, a été lui-même déporté par Napoléon Ier et n'a été libéré de sa déportation à Fontainebleau qu'à la fin de l'épopée de l'Empereur.

Plus près de nous encore, le Bienheureux Pie IX - il est béatifié le 3 septembre 2000 par Jean-Paul II, les chrétiens devraient s'en souvenir - avait fuit les assassins armés par Mazzini à Rome en 1848 et y fut seulement rétabli en 1850 par les troupes françaises du général Oudinot, député de gauche de l'Assemblée Législative de 1848. Pie IX publia plus tard un Syllabus, honni de bien des ennemis de l'Eglise et dans lequel il condamnait cette erreur :
"XX. La puissance ecclésiastique ne doit pas exercer son autorité sans la permission et l'assentiment du gouvernement civil."
Tout se passe aujourd'hui comme si la puissance ecclésiastique devrait requérir la permission et l'assentiment ... des médias ! Que ces derniers se rassurent. Ils ont encore une longue carrière à mener avant d'obtenir une telle chose, même et, presque surtout, quand il leur semble avoir fait reculer le Pape.

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