L'affaire faismesdevoirs.com
Philippe Brindet
7 mars 2009


Un site Internet proposait aux élèves de transmettre l'énoncé de leur devoir à la maison, de payer une somme déterminée, puis de recevoir par mail un devoir fait, prêt à être remis à l'école ...

Lorsque le site a été annoncé, on a entendu les syndicats enseignants, les fédérations de parents d'élève et le ministère de l'Education nationale s'élever contre ce qui porterait atteinte à l'honnêteté du contrôle des connaissances. Le site a ouvert le 6 mars et a reçu un nombre extrêmement élevé de connexions et de très nombreuses commandes payantes. Il s'agissait donc d'un véritable succès commercial.

Comme le promoteur de ce site, un dénommé Boukris, est un jeune diplômé d'une des ces écoles de commerce que le monde entier nous envie, on s'interroge alors sur la raison qui a pu pousser ce commercial à arrêter là l'initiative et à annoncer qu'il allait rembourser les clients qui avaient déjà passé des commandes. En effet, il se comporte comme s'il découvrait d'un seul coup un problème drastique. Malgré nos rapides recherches, il nous a été impossible de trouver à cette heure l'existence d'un tel problème.

Cependant deux choses orientent notre réflexion de ce point de vue.

Le Ministre Darcos, d'après le quotidien Libération, aurait déclaré :
"Le meilleur endroit pour être éduqué et pour avoir des copies corrigées, c'est l'école de la République, je n'encourage nullement des dispositifs payants qui permettent de rendre ces services-là".
Sur le site en question, on trouve ce texte assez alambiqué :
"Nous tenons à vous présenter toutes nos excuses dans la mesure où nous réalisons à ce jour, à quel point ce site va à l’encontre de nos propres valeurs. Enfin, nous souhaitons faire en sorte que les générations futures soient meilleures que les précédentes, et FaisMesDevoirs.com ne pourra en rien y contribuer. Les nouvelles technologies doivent servir à nous améliorer et non à nous assister."
Seul le titre de la page indique une décision de fermer le site.

Enfin, l'article de Libération cite un site ami LePost.fr qui aurait tracé les collaborateurs qui devaient être cités dans les pages du site faismesdevoirs.com avant sa fermeture et qui a noté que ces individus ne s'identifiaient pas par leurs diplômes. On se demande si le site n'aurait pas été fermé à la suite à cette révélation du site LePost.fr, les "collaborateurs correcteurs" ayant été effrayés à la dernière seconde de se trouver sous le feu des sycophantes du Net. Mais, nous ne disposons d'aucune information à ce propos et ne faisons qu'émettre ici une hypothèse.

Si nous revenons à l'examen des déclarations de Darcos et Boukris, ce qui est suggestif se trouve dans leur point commun.

Darcos commence le "dialogue" par l'invocation à "l'école de la République".

Boukris, paniqué, prend la décision de fermer son site et, comme un élément antisocial trainé devant un tribunal en Chine communiste, confesse que son "site va à l’encontre de nos propres valeurs". La suite de sa déclaration est à peu près identique aux confessions des victimes des purges staliniennes après passage à la Loubianka.

Les journalistes de la presse la meilleure du monde dans le meilleur des mondes assurent, et il n'y a aucune raison de ne pas les croire, que Boukris n'a subi aucune pression.

Mademoiselle Cunégonde, qui lit par dessus mon épaule, me glisse qu'elle a entendu dire que le fait que Boukris ferme son site sans avoir subi aucune pression démontre combien nous vivons sous un régime libéral dans lequel règne la paix et la prospérité, la liberté comme la fraternité.

o o o


Post-scriptum

Mademoiselle Cunégonde me dit que, décidemment, j'en fais trop. Je lui ai promis de m'amender, puisque nous vivons dans le meilleur des mondes.