Réactions de la presse dans l'affaire Kerviel

Philippe Brindet
06 octobre 2010


Le Nouvel Obs' publie sur son site Internet une Revue de Presse des réactions et commentaires concernant la décision de justice prononcée à l'encontre d'un trader de bourse, Jérôme Kerviel, qui, par des manoeuvres assez rocambolesques, était parvenu à réaliser des gains boursiers au bénéfice de son employeur, gains boursiers astronomiques.

La banque Société Générale a soudainement décidé de dénoncer les manoeuvres de son courtier et de résoudre, au plus mauvais moment, les positions boursières prises par Kerviel. Arrêté, jugé, Kerviel est depuis le 5 octobre 2010, condamné par le Tribunal correctionnel de Paris pour abus de confiance, faux, et autres délits du même genre. Il est condamné à 5 ans de prison et à indemniser son employeur à hauteur des pertes que celui-ci a généré lors de la résolution de sa malversation. Kerviel aurait interjeté appel de ce jugement.

Dans sa revue de presse, le Nouvel Obs' nous donne un moyen simple de dresser une statistique des réactions de ses confrères. On décide de classer en deux catégories les articles résumés dans la revue de presse :
  1. se félicite de la condamnation de Jérôme Kerviel ;
  2. proteste de l'absence de mise en cause de la Société Générale.
  1. La condamnation de Jérôme Kerviel est légitime :
    un seul journaliste soutient cette position : Laurent Joffrin de Libération
  2. L'absence de mise en cause de la Société Générale est consternante :
    14 journalistes et leurs journaux expriment leurs regrets de cette situation.
La presse majoritairement dénonce l'identité d'hypocrisie du système bancaire - qui se prétend insopçonnable avec une prétendue "meilleure régulation possible" - et d'une justice acquise aux institutions "insoupçonnables", comme le système bancaire. Il y a là comme une collusion de puissances fort désagréable pour ceux qui la subissent.

La solitude de Libération parmi ses concurrents de presse rend plus évidente sa collusion avec les groupes de pression qui mènent la faillite de la France. Ce quotidien presque illisible, est pourri du libéralisme le plus imbécile, qu'il croit tempérer par une servilité désespérante à toutes les puissances d'argent, dissolvantes et socialistes. On note l'identité de ton de la position exprimée par Libération avec celle de Michel Sapin, socialiste.

On note que la revue de presse du Nouvel Obs' a exclu les positions du Figaro et du Monde. Il ne rapporte pas non plus d'ailleurs sa propre réaction. Le Figaro donnait la parole, dès hier à un ancien "Dir' Comm'" de la Société Générale qui ne trouvait pas assez de mots pour hurler son mépris à l'encontre de Jérôme Kerviel («Ce qu'a fait Jérôme Kerviel est monstrueux»). On peine à imaginer que cette position ne soit pas celle du Figaro.

Il est difficile de trouver une peinture plus désespérante de la société dans laquelle nous vivons.

On note la réaction de Didier Louis, dans le Courrier Picard, qui dénonce un jugement "d'une froideur, d'une lourdeur totale, (d'une absence d') une once d'humanité.". Le public partage probablement cet avis. Le sentiment d'une perte de confiance dans le système judiciaire est de plus en plus étendu dans la société française. Le système politique est pratiquement disqualifié. Le système économique est largement désavoué par sa financiarisation et son immoralité. La population miséreuse s'accroît aussi vite que la richesse d'une immorale minorité. Et cette population se sent aussi lourdement condamnée par la Police, la politique et l'économie que Jérôme Kerviel par la justice acquise aux intérêts de la Société Générale.

Les causes d'une révolution violente sont donc maintenant bien établies. Reste comme seul inconnu le retard dans son éclatement.

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