Quelques réflexions sur le rapport du HCI

Philippe Brindet
25 octobre 2010
Le quotidien Le Figaro publie le 25 octobre 2010 sur son site Internet un document qui semble être le document de travail avant édition finale d'un Rapport sur l'intégration des enfants de l'immigration par le système scolaire républicain. Ce rapport a été commandé par le Premier Ministre François Fillon et devrait lui être remis ce jour. L'autorité de publication est le HCI - Haut Conseil à l'Intégration, établi auprès du Premier Ministre 1.

La possession de ce document de travail est problématique. Quelle confiance peut-on avoir en lui ? Nous ne pouvons l'évaluer. Une comparaison attentive avec la version publiée officiellement le révèlera. Mais d'ores et déjà nous notons plusieurs points très intéressants.

Des statistiques renforcées

Il existe actuellement une situation douteuse. Selon certaines lois récentes, il est interdit de dresser et de diffuser des statistiques concernant les origines de la population résidant en France. Le principe de cette interdiction est celui de la lutte contre le racisme, la xénophobie et les discriminations associées.

Les statistiques les plus récentes concernant ces questions sont donc disponibles à l'étranger. Ainsi, l'Institut Pew estimait vers 2005 à environ 7 millions la population française de culture musulmane.

Dans le préambule du rapport du HCI, il existe une statistique de la population immigrée, ce qui provoque notre étonnement quand on se base sur l'idée que des lois récentes interdisaient la recherche de tels chiffres.
En 2005, la proportion de jeunes de 0 à 18 ans d'origine immigrée (au moins un parent immigré) est de 18,1%, contre 11,5% en 1968. Ces descendants d'immigrés sont 6 millions, dont 4,3 millions de 15 ans et plus et 1,85 millions de moins de 15 ans. Les immigrés et les descendants d'immigrés représentent donc aujourd'hui un cinquième de la population résidente en France (11, 7 millions).
Source : Rapport du HCI - document préparatoire, page 8
On fera deux réflexions, et deux seulement.
  1. La valeur de ces chiffres est de fixer un ordre de grandeur. Y a t'il trop d'immigrés ou pas assez est une question qui, à nos yeux, ne se pose pas. La seule question qui ne peut pas diviser ou dresser les uns contre les autres est celle de savoir simplement combien y a t'il d'immigrés. Le HCI répond : "1 français sur 5".
  2. Le HCI reprenant une étude de la démographe Michelle Tribalat, note que :
    ... on observe que si la proportion de jeunes issus de familles dont au moins un des parents est immigré s'élève à moins de 20% sur l'ensemble du territoire, cette proportion varie fortement selon les départements, les villes et les quartiers. Ainsi, en 2005, les plus fortes concentrations départementales sont en Ile-de-France avec la Seine-Saint-Denis (57%), Paris (41%), le Val-de-Marne (40%) et le Val d'Oise (40%).

    Cette surreprésentation dépasse les 60% dans vingt communes, pour l'essentiel en Ile-de- France. En 2005, en Seine Saint-Denis, un jeune sur cinq est d'origine maghrébine et plus d'un sur six est originaire d'Afrique subsaharienne.
    Source : Rapport du HCI - document préparatoire, page 9
    Le HCI parle de "surreprésentation". Il utilise ici un terme non politique, mais probablement statistique. Il a bien tort. Car, un jour ou l'autre la seule statistique s'exprimera en termes ou bien de votes ou bien en termes d'émeutiers. Dans les deux cas, c'est bien d'une estimation politique responsable qu'il faudra s'occuper et plus de considérations statistiques. On rappelle seulement qu'en France, on vote à partir de 18 ans et que les plus vieux des jeunes qui sont évoqués ici voteront dans seulement trois ans, soit en 2013.
On constate donc que les chiffres de 2005 publiés par l'institut américain Pew sont confirmés et qu'ils sont encore amplifiés au moins depuis 2008 par le HCI lui-même.

Le principe de laïcité

On a noté que le HCI se cramponne désespérement à un "principe" constitutionnel, celui de laïcité. Il y aurait beaucoup à dire sur les instances de laïcité que le HCI présente dans son rapport. On peut citer ce passage à titre d'exemple :
La laïcité n’est pas seulement un principe politique. C’est aussi une situation de conscience – la disposition intellectuelle et éthique acquise d’une conscience formée à se séparer intérieurement de ses convictions, pour les examiner de façon personnelle et critique. Source : Rapport du HCI - document préparatoire, page 109
Le principe de laïcité auquel le HCI se réfère dans la plus pure tradition de l'anticléricalisme socialiste des années 50, a été critiquée par de nombreux intellectuels, religieux ou non.

Le HCR ne le cache pas, mais persiste sans admettre une seconde la validité de ces critiques.

La première critique est celle de la liberté de conscience. En effet, comment admettre que la laïcité puisse être une situation de conscience d'une part, et charger une institution d'Etat, l'école de la République, de contrôler le for intérieur de chaque élève au nom de l'éducation des conscience, d'autre part. Si la laïcité est une "situation de conscience", alors l'Etat n'a pas le droit de s'y ingérer à cause du principe supérieur de la liberté de conscience.

Mais cette critique a déjà souvent été faite. Et les dictatures ont toujours considérées qu'il était de leurs prérogatives de contrôler les consciences pour les conformer à un modèle correct. La République française semble ici, en plein sarkozysme, vouloir reprendre le flambeau des dernières dictatures qui ont parcouru le XX° siècle avec l'effrayant succès que l'on sait. Se rend on compte dans les ors des ministères où évolue le HCI que les dernières dictatures sont de minables pays arriérés dont la population est maintenue dans un état de sous-développement ahurissant ?

Quant à l'opération éducative de "séparation" entre les convictions et la critique personnelle, c'est d'une véritable plaisanterie dont il s'agit. Ou alors d'une insulte à la manière dont les convictions se forment dans la conscience d'un être libre.

On sait que de nombreux personnels de l'enseignement acquièrent avec l'expérience un mépris essentiel pour ce qu'ils considèrent comme le "matériel humain" que la République leur confie pour en faire des citoyens dociles et soumis à la Loi. La chose étrange, c'est qu'une fraction d'environ 10% de ce "matériel humain", entre 18 et 30 ans, est embauché parmi le personnel enseignant. La chose étrange, c'est que ce "matériel humain", méprisé par le personnel enseignant, accède entre 18 et 25 ans aux emplois de l'Industrie et du Commerce, des Arts et des Services, et qu'il y fait progresser une société qui, malgré ses défauts, est toujours une société avancée. La séparation de la conscience des convictions est une illustration de ce mépris des enseignants à l'égard des élèves et du reste de la société.

Le principe de laïcité, s'il devait s'appliquer selon le modus vivendi du HCI, à savoir de "former les consciences à se séparer intérieurement de leurs convictions, pour les examiner de façon personnelle et critique", en paraphrase de la citation, conduirait à donner un droit scélérat à l'enseignant républicain de vérifier qu'il a bien "séparé la conscience de l'apprenant de ses convictions". Et si le formateur peut vérifier, c'est d'abord qu'il a obtenu le pouvoir de réaliser sous la contrainte cette séparation de la conscience d'avec les convictions.

Il n'y a pas d'autre objectif à une telle "séparation" que d'éradiquer la religion.

On ne peut que s'inquiéter de deux choses.
  1. Il est toujours inquiétant de lire sous la plume d'un haut fonctionnaire et de son équipe qu'ils mettent en place ce qui n'est jamais qu'une persécution religieuse.
  2. En réalité, seul le christianisme est en pratique visé, par la persécution religieuse du principe de laïcité. Parce que l'Islam, s'il est aussi une religion, est d'abord une politique, et une politique qui se fait ailleurs qu'en France. Que fera le haut fonctionnaire du HCI quand un mollah prendra la direction du Ministère de l'Education nationale ou quand les musulmans remporteront les élections ? Tout le monde le sait. Il voilera ses femmes et les battra à son gré.
Le "dogme" de la laïcité sera la cause de la perte de la République parce que son principe est inefficace à intégrer les populations immigrées qu'etudie ce Rapport du HCI. Et tout le monde, y compris au HCI, le sait.

Pourquoi ?

Si le principe de laïcité était un principe opérant, cela se saurait. Ce principe appartient à la Constitution de la IV° République dont certains constitutionalistes affirment qu'elle est incluse dans celle de la V°, sous l'empire de laquelle nous vivons.

Or, ce principe n'a jamais marché en 50 ans, puisqu'aujourd'hui en 2010, c'est son application que réclame le HCI pour "intégrer" les populations immigrées dans l'école de la République. Or, les dites populations à intégrer refusent farouchement l'application de ce principe. Et elles sont majoritaires dans plusieurs zones de la République.

Il est vital pour la République qu'elle trouve autre chose que la "laïcité" pour résoudre le problème de paix sociale posé par la présence d'un groupe humain important qui n'est pas lié avec l'affecto societatis de la France. La République est tentée par la police. C'est encore un mauvais moyen.

Une incompréhension radicale de l'islam

Le HCI est sûrement composé de gens érudits et brillants. Il n'est donc pas ici question de leur "faire" une quelconque leçon. Mais, on ne peut que s'interroger en lisant une phrase comme celle-ci :
Le principe de laïcité peut apparaître, pour certains, comme une atteinte à la liberté de culte faite aux musulmans. Il est pourtant le nécessaire édifice des principes de liberté et d'égalité : l'élève est un citoyen libre, qui n'est pas soumis "par nature" à une religion.
Source : Rapport du HCI - document préparatoire, page 105
Or, l'Islam est par excellence la religion de la soumission, traduction du mot même d'islam [2]. Et cette soumission n'est absolument pas limitée à des "convictions" que la conscience individuelle "correctement formée" aurait la permission de séparer de son usage libre et critique.

Le HCI présente donc l'incantation du recours au principe de laïcité comme si le problème de la soumission islamique n'existait que dans le cadre de consciences "attardées". Mais c'était le vieux schéma qui prévalait dans les sectes politiques anticatholiques au début du XX° siècle ? Et si cette arme a été d'une redoutable efficacité puisque le catholicisme est passé de 95% de la population française en 1900, à probablement moins de 5% en 2000, elle est totalement inefficace avec l'Islam.

Pourquoi ?

Le christianisme est, malgré ce que ses adversaires soutiennent, une religion de non-violence et de soumission à l'autorité légitime [3]. Ainsi, malgré ce que des adversaires du christianisme affirment, Jésus, au cours de sa vie en Palestine au milieu du peuple juif opprimé par les Romains, n'a jamais préché la révolte contre ce pouvoir.

Lors de la Révolution de 1789, les catholiques ont été férocement persécutés même s'ils s'étaient placés dans deux attitudes qui semblent opposées. La première attitude a regroupé les catholiques qui, pensant que l'Ancien Régime était la seule autorité légitime, ont résisté contre la persécution, le plus souvent en célébrant clandestinement leur culte et en mourant lorsqu'ils étaient pris. La seconde attitude a regroupé les catholiques qui pensaient que la République était devenu le régime légitime. Après une ou deux brèves années au cours desquelles ils ont connu une paix douteusement acquise, ils ont été persécutés au moins autant que les catholiques de l'autre groupe [4].

Lors de la Terreur Blanche, après la chute de Napoléon et la Restauration des Bourbons, les exactions commises l'ont été par des excités politiques qui pouvaient ou non revendiquer une appartenance religieuse. Mais, il n'y a aucune marque que cette Terreur Blanche ait la moindre affinité religieuse.

L'Islam n'est pas en situation de se soumettre. S'il est dominé, il obtient en général les moyens de se maintenir. C'est ce qui s'est passé notamment pendant l'époque maudite de la colonisation de l'Afrique de Nord notamment. Mais, dès qu'il a les coudées franches, l'Islam n'a de cesse que de conquérir la terre d'islam. Et une terre d'islam est une terre où le croyant peut pratiquer les préceptes de l'Islam. Et une terre d'islam doit être soumise entièrement aux préceptes de l'Islam [5].

Il n'y a jamais eu aucun dialogue, aucune composition entre l'Islam et le régime républicain. L'Islam ne dialogue pas, ne compose pas. Il conquiert. C'est ce que le HCI et ses fonctionnaires savent parfaitement, mais ce dont ils ne peuvent discuter. Correction politique oblige.

En manière de conclusion

Le rapport du HCI se résume très simplement par ces mots qui ne sont pas de lui semble t'il, mais qui en dérivent naturellement :
Le mécanisme d'intégration laïque et républicaine des cultures étrangères a complètement échoué.
C'est exactement la même chose déclarée le 14 octobre 2010 par la Chancelière Angela Merckel :
Le multiculturalisme a échoué, il a lamentablement échoué.
Et l'Occident dû se réveiller avec la gueule de bois des lendemains de beuveries sinistres ...
o o o


Notes

[1] Le Haut Conseil à l’intégration a pour mission de "donner son avis et de faire toute proposition utile, à la demande du Premier ministre sur l’ensemble des questions relatives à l’intégration des résidents étrangers ou d’origine étrangère". Il prépare le comité interministériel à l’intégration. Source site du HCI
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[2] "Bien que le mot « Soumis » soit l’équivalent français du mot Arabe « Musulman », et le mot « Soumission » soit l’équivalent français du mot Arabe « Islam », l’implication sous-jacente de ces mots est très profonde, et bien loin des significations superficielles qui sont traditionnellement comprises et utilisées.

La Soumission est une religion par laquelle on reconnaît l’autorité absolue de Dieu, et atteignons une conviction que seul Dieu possède tous pouvoirs ; aucune autre entité ne possède un pouvoir qui est indépendant de Lui.
"
Source : Site officiel de la Mosquée de Tucson, Arizona, USA.

Le christianisme pose exactement la même définition du pouvoir, ce que l'imam de Tucson souligne d'ailleurs. Mais, le christianisme est animé par un principe de liberté absolue de l'homme aussi bien comme individu que comme peuple. De ce fait, le chrétien est soumis à Dieu en ce que son Règne n'est pas de ce monde et soumis aux autorités légitimes qui possèdent cette autorité seulement parce qu'Il l'a voulu. Le principe est énoncé dans la citation célèbre et controversée : "Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu" (Evangile Mt 22, 21). retour au texte

[3] Certains rétorquent que la Vendée de 1792 a été soulevé par les prêtres. C'est faux et c'est vrai. Il est indéniable que des prêtres ont été pris et atrocement maltraités au milieu de leurs paroissiens. Mais, leur devoir était d'y rester. Et leurs paroissiens avaient la conviction que l'autorité de la Convention n'était pas légitime.

Les mêmes qui les accusent de trahir la non-violence du christianisme, ont le front de réclamer le droit de se défendre contre l'oppression. C'est seulement ce qu'on fait les catholiques Vendéens. C'est l'oppression de la Convention qui a lancé les colonnes infernales qui ont inventé les massacres de masse de population civile, y compris le gazage de masse, inventé par le Conventionnel Fourcroy :
" ... le 11 septembre 1793, Rossignol, renchérissant sur ces fumées soporifiques dont parle Santerre, ne craint pas d'avouer que, pour terminer la guerre, il faut avoir recours aux ressources de la chimie.
«Il serait à désirer en mesure générale, écrit-il au Comité de Salut public, que l'on envoyât près de cette armée le citoyen Fourcroy, membre de la Montagne, pour nous aider de ses lumières et enfin parvenir à la destruction des Brigands. C'est le sentiment d'un de vos frères et amis qui connaît son talent en chimie». [...]
Pendant ce temps, les esprits travaillaient dans les états-majors révolutionnaires pour découvrir le secret chimique qu'on implorait de Fourcroy.
"
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[4] C'est le cas des Carmélites de Compiègne qui ont été guillotinées le 17 juillet 1794, alors même qu'elles avaient appliquée la Constitution civile du Clergé et prêté le serment de fidélité à la République. retour au texte

[5] On voit l'inconséquence des politiciens qui ont milité en faveur de l'ouverture de lieux de culte partout en Occident autrefois chrétien. L'ouverture de mosquées transformait en fait l'Occident chrétien en terre d'islam dar es salam sur laquelle seul le Quran peut régner en totalité sur une république par nature islamique.

La folie de ces politiciens est d'avoir, par ignorance ou par calcul de conversion à l'Islam, comme certains politiciens de haut rang du Parti Socialiste, amalgamées les religions comme un seul "héritage ridicule des temps de l'obscurantisme, sans avenir". La chose leur avait paru assez bien conduite à l'encontre du christianisme. Ils n'ont pas vu la différence, ou ils ont voulu utiliser une confusion, avec l'islam. Maudits soient ils.
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