Revue d'opinions - Février 2012

Philippe Brindet - 28 février 2012

1 - Les politiques de l'étrange

    1.1 - Les convulsions du monde islamiste

  1. Moustafa Abdeljalil = «C'est l'islam modéré qui va régner en Libye», entrevue par Pierre Pirer dans Le Figaro du 01 février 2012 (en local).

    Monsieur Abdeljalil est le Président du CNT de Libye. Autrement dit c'est le "chef" de la révolution. Presque un haut fonctionnaire du Quai d'Orsay si nous en croyons Son Excellence BHL et Alain Juppé, vous savez cet édile d'une ville de province. Pas libyenne ...

    Comble de l'ingratitude, la mine réjouie de ravissement, le "chef" de la révolution libyenne remercie "le président Sarkozy" dans la plus pure tradition de l'Afrique de France ... La pagaille en Libye ? C'est "les kadhafistes", enragés d'avoir été écartés du droit de se présenter aux élections. Pas de problème, "on" va les éliminer. Pensez. Ils sont moins de deux mille. Des armes, mais surtout de l'argent.

    Pas de problème en Libye. L'ordre règne. 50% de sièges du Parlement sont réservés aux femmes. C'est l'islam modéré qui va gouverner le pays. C'est promis.

    Maintenant, c'est Sarkozy qui a la mine ravie ... Une promesse. Il connait ...

  2. Égypte, un an après la chute de Moubarak, la répression fait rage, par Geneviève Garrigos de Amnesty International dans Le Nouvel Observateur du 11 février 2012 (en local).

    Amnesty International est focalisé sur les atteintes aux droits des femmes en Egypte. C'est dramatique, nous en convenons. Mais, c'est toute la nouvelle société égyptienne qui est une atteinte aux libertés fondamentales. Et Madame Garrigos ne met en cause que l'armée. Pire, elle appelle de ses voeux l'action bienfaitrice du nouveau Parlement dominé aux deux tiers par les islamistes ! Nous n'en dirons pas plus. Amnesty International a toujours travaillé en faveur des pires dictatures en combattant de manière acharnée les dictatures faibles et fragiles.

  3. Truth, lies and Afghanistan, par le Lieutenant-Colonel Daniel L. Davis, dans le Armed Forces Journal de février 2012 (en local).

    L'article de cet officier supérieur de l'Armée américaine est littéralement une bombe qui éclate de l'intérieur des forces armées de l'ensemble des Alliés qui occupent l'Afghanistan aujourd'hui. Cet article qui va coûter extrêmement cher à son auteur, nous apprend deux choses :

    1. La réalité sur le terrain est terrible. Ceux que l'on nomme "les talibans" ou plus sûrement "les insurgés" - et on finit par se demander contre qui ? - sont les maîtres pratiquement partout sur le territoire occupé. Les forces armées afghanes ne sont là que pour servir de tampon et les talibans les élimineront quand ils le voudront. Ils menacent directement les familles des soldats afghans qui, pire encore, ne supportent pas la présence des étrangers sur le sol de leur tribu. Ils ignorent à peu près complètement l'existence d'un état afghan.
    2. Les rapports officiels mentent effrontément sur la situation sur le terrain.
    Nous en étions convaincus. Le Lt Col Davis nous le confirme.

  4. 1.2 - La Grande Europe

  5. My vision for a better Russia, par Vladimir Poutin dans The Washington Post du 8 février 2012 (en local).

    Vladimir Poutine écrit dans les colonnes du Washington Post ! La nouvelle est sensationnelle. On a déjà eu l'occasion d'apprécier la pensée de Dmitri Medvedev. Ici Monsieur Poutine expose son point de vue politique pour la Russie à la veille de l'élection présidentielle russe à laquelle il compte participer pour succéder à Dmitri Medvedev.

    C'est justement ce qui trouble les adversaires idéologiques. Que le duo Medvedev-Poutine alterne dans une monopolisation du pouvoir au détriment de l'opposition et celà dans le respect trompeur d'une règle électorale destinée justement à rassurer cette alternance.

    La chose étonnante est double :

    1. que le duo Medvedev - Poutine n'ait pas explosé en vol lors d'affrontements politiques dont ils ont su éviter les dégats les plus graves
    2. que la majorité du peuple russe conserve un attachement au projet politique des deux hommes pour la Russie.
    Enfin, c'est peut-être ce que montrera l'élection présidentielle. Ou alors non.

    Rappelons la pensée de Medvedev telle qu'il l'exprimait dans Gazeta en 2008 :

    • la société ne se confond pas avec l'Etat ;
    • l'Etat n'est pas le propriétaire des biens qu'il redistribue ;
    • le recours systématique au crédit est immoral, imprudent et dangereux ;
    • la croissance économique est une nécessité sociale impérative et la décroissance autoritaire est un suicide collectif ;
    • Pour assurer la croissance, il ne faut pas se limiter aux secteurs qui "marchent", mais il faut aller aussi sur les secteurs difficiles.

    Que dit Vladimir Poutine ?

    Vladimir Poutine constate un état intermédiaire de démocratie en Russie. Et cet état intermédiaire est une marche vers la pleine démocratie. Mais, actuellement, Poutine souhaite éviter à la Russie la politique spectacle des fausses promesses et des miroirs aux alouettes. On le comprend. Mais son point de vue sera mal interprété. On notera aussi que la thèse selon laquelle la Russie est dans un état intermédiaire vers la démocratie était déjà une croyance des socio-démoccrates et des mencheviks en 1917 et que la plupart des marxistes pensaient avant 1914 que la Russie n'était pas la cible suivante de la révolution démocrate. On sait ce qu'il en fut.

    Notant la méfiance nouvelle des jeunes générations à l'encontre des oligarques, Poutine pense qu'il faut leur permettre d'agir dans une société libérée de la corruption systémique. C'est un bon sentiment. Mais ce n'est pas bien suffisant.

  6. Viktor Orban : "La démocratie est en difficulté en Europe", Propos recueillis par Sylvie Kauffmann et Yves-Michel Riols dans Le Monde GEO ET POLITIQUE du 04 février 2012 (en local).

    Viktor Orban, actuel Premier Ministre de la Hongrie est suspecté d'atteintes graves à la démocratie par la gauche européiste, emmenée par l'inénarrable Cohn-Bendit.

    Qui est Viktor Orban, d'après lui-même :

    Je me définis en fonction du groupe politique auquel j'appartiens, celui du Parti populaire européen (qui rassemble les principaux partis de la droite européenne), dont je suis le vice-président. Cela veut dire une orientation démocrate-chrétienne, un attachement à la liberté, à la responsabilité individuelle, à la souveraineté nationale. En termes occidentaux, c'est le centre droit avec un profond enracinement dans des valeurs. Certaines sont traditionnelles, comme le christianisme, la famille et la liberté. D'autres sont plus progressistes, comme la participation et la mobilité sociale.

    Tout le reste est un peu sans importance. La chose claire, c'est que la gauche européenne qui ne supportait déjà pas la droite, se met à ne plus supporter ... le centre-droit. Voilà tout le sel de l'affaire hongroise.

  7. Hongrie, anatomie de la méthode Orban, par Yves-Michel Riols dans LE MONDE GEO ET POLITIQUE du 04 février 2012 (en local).

    Après le concert d'invectives gauchistes, la presse fançaise commence à sortir des articles un peu moins idéologiques, aux ordres des puissances gauchistes. Dans un paragraphe étincelant, le journaliste révèle l'histoire politique récente de la Hongrie qui explique et la victoire de Orban et ses tracas avec la gauche :

    ... le pays sera à nouveau gouverné par une coalition d'anciens communistes et de dissidents libéraux. Le Viktor Orban d'aujourd'hui, tant décrié en Europe, ne s'explique qu'à la lumière de ces huit dernières années. Des années de déclin, marquées par un laxisme budgétaire, des affaires de corruption en cascade et un discrédit massif de l'élite au pouvoir.

    Le premier ministre socialiste, Peter Medgyessy, membre du dernier gouvernement communiste à la fin des années 1980, est obligé de jeter l'éponge, en 2004, après des révélations sur sa collaboration avec les services secrets de l'ancien régime. Son successeur, Ferenc Gyurcsany, ex-dirigeant des Jeunesses communistes, devenu millionnaire, provoque lui aussi un tollé national lorsque ses propos, enregistrés à son insu, sont rendus publics. Il reconnaît avoir "menti le matin, menti l'après-midi et encore menti le soir" sur l'état du pays, aux Européens et à ses compatriotes, pendant plusieurs années, pour assurer sa réélection en 2006.

    Face à ces mensonges, le sang des Hongrois n'a fait qu'un tour. En septembre 2006, des manifestations de colère éclatent dans tout le pays.
    Que dire de plus ? Que, chassé par les mensonges de la gauche aux élections de 2002, Viktor Orban est réinstallé au pouvoir pour chasser la gauche corrompue de Hongrie. Cette même gauche européenne qui hurle maintenant à la dictature.

2 - La France qui descend vers le bas

  1. Grand-froid et sans-logis, rien n'a changé depuis 1993, par Dominique Versini dans Le Monde du 9 février 2012 (en local).

    Madame Versini est ancienne Secrétaire d'Etat, chargée de la lutte contre l'exclusion et la précarité, dans le gouvernement de Monsieur Raffarin. Elle a perdu à peu près toutes ses tentatives électorales alors qu'elle était parfaitement connue comme activiste du SAMU Social du Dr Emmanuelli. On mesurera là combien les citoyens n'aiment pas les gens qui aiment les pauvres. Les citoyens préfèrent les vainqueurs qui vont exhiber leur "montre Rollex" dans leur bistrot favori, "Chez Maxime", avec de superbes créatures que, parfois, ils épousent avant de s'en séparer avec des rires de bon garçon facétieux. C'est tout le sel de la démocratie ...

    Alors que des dizaines de milliers de personnes souffrent du froid sans aucun abri, Madame Versini regrette le temps où certains de ses amis secouaient notre aveuglement hypocrite. Et elle conclut son article en écrivant :

    Je crois vraiment que s'ils ont été incapables d'empêcher un grand nombre de nos concitoyens de "couler" c'est parce que ces détresses humaines ne les atteignent pas dans leurs sphères, car la société dont ils rêvent pour leurs enfants, c'est celle d'un modèle libéral qui ne valorise que l'argent et ceux qui en gagnent.

    Les crises économiques laissent toujours indemnes ceux qui les ont provoqué. Et c'est le reste de la population qui sombre. Que leur importe à tous les bourgeois et à leurs nervis qu'il y ait dix mille ou cent mille sans abri. Chacun fait son affaire. Les uns sont parfaitement adaptés à un monde cruel qu'ils forgent volontairement et sans vergogne, les autres n'ont qu'à sombrer quand ils ne servent plus à rien.

    Il y a pire. Entre la caste dirigeante - cinq cent mille individus peut être - et les pauvres extrêmes, il y a dix millions et plus de petits pauvres. Et peut être, vingt ou trente millions de gens à la fortune médiocre. Les membres de la caste dirigeante sont complètement tournés vers le mondialisme. Et les "pauvres" du Bangla Desh pour lesquels ils ne feront rien les affectent plus que la dame qui passe dans le RER en débitant son lamentable couplet.

    Madame Versini croit que les riches qui nous gouvernent ne pensent pas aux pauvres parce qu'ils rêvent d'une société pour leurs enfants. Elle se trompe complètement. Les riches ne rêvent pas. Ils savent que leurs enfants hériteront de leurs "mérites" républicains.

  2. François de Singly = 'Le divorce, c'est le droit de dire non. C'est un grand progrès', entetien avec François de singly dans Le Monde du 4 février 2012 (en local).

    Monsieur de Singly est un sociologue caractéristique de l'Université française. Elle est marquée par l'idéologie de la Révolution française. Il n'y a guère que dans l'Université française qu'on peut prendre pour vérité ce qui est une erreur bicentenaire démontrée. Et pour se maintenir, ces professeurs adulés, on se demande pourquoi, n'hésitent jamais à prendre ce qu'ils prennent pour l'air du temps.

    Et quelle meilleure place que le mariage dont la statistique réduit de moitié tous les dix ans. La thèse de Singly est que les femmes "exigent" une porte de sortie ouverte dans le mariage patriarcale. Cà devrait plaire. Alors, le "brillant professeur" n'hésite pas, certain que les moeurs donneront raison à sa thèse.

    Quelle motivation pousse ces manieurs d'idées à penser le mariage comme le premier acte d'une comédie dont le second est un divorce ? La protection de l'autonomie de l'individu. Et il n'y a pas que dans le mariage que ce diktat spécieux est poussé.

    Séparé des structures sociales dans lequel il s'épanouit, l'individu devient un être faible, influençable, surtout s'il est persuadé qu'il contrôle son destin par sa seule volonté. Il est manipulable comme un pantin. Le conjoint qui divorce pour "gagner" son autonomie est disponible pour subir les dictatures les plus effrayantes qu'il suivra avec plaisir, avec avidité. Voilà le rôle essentiel du divorce en tant que mouvement de manipulation de la société.

    Maintenant, le discours de Singly se lit identiquement dans les proclamations enflammées de la Convention en 1793, avec des fous furieux comme Roux ou Chaumette, Clootz ou Paine. Et là, Singly prend un risque. Robespierre détestait ce genre de menée ...

  3. La bataille des classes moyennes, par Alain Duhamel dans Le Point du 2 février 2012 (en local).

    Monsieur Duhamel, célèbre éditorialiste politique, oppose l'avis du ministre Wauquiez publié dans un premier livre de celui de deux sociologues, Goux et Maurin, dans un second ouvrage. N'ayant lu ni l'un ni l'autre, je ne prendrai pas position. Seulement, Goux et Maurin penseraient que les classes moyennes sont en fait satisfaites de leur sort et leur critique de la société se limiterait à une vague récrimination fiscale, nous dit Duhamel lisant Goux et Maurin avec délectation : "Elles éprouvent un fort ressentiment, conscientes de payer beaucoup plus par l'impôt qu'elles ne reçoivent en allocations sociales."

    Si l'on suit Duhamel, lecteur ravi de Goux et Maurin, pour les classes moyennes, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Elles sont satisfaites de leur revenu, de leur culture, de leur habitat - elles s'y stabilisent - enfin de tout, quoi.

    Je pense qu'on ne peut se tromper plus lourdement. La qualité de la formation, essentielle à l'épanouissement de la classe moyenne, a été brutalement détériorée par l'Administration qui s'en est chargée. La culture, de laquelle s'est chargée une autre Administration, a été abandonnée aux philistins et autres fesse-matthieu que l'on prend pour des parangons de l'Art, quand ils sont des laquais grimaçants qu'on a envoyé à l'Opéra à la place de leurs maîtres. Et la fiscalité est lourdement spoliatrice des premiers "francs" gagnés par les classes moyennes. Pire encore, l'héritage est durement confisqué par l'Etat, alors que c'était la grande chance de la petite bourgeoisie.

    Je pense vraiment que Wauquiez a raison contre Goux et Maurin et que Duhamel, dans son rôle de l'amant de Cunégonde, se trompe. Comme tous les amants de Mademoiselle Cunégonde.

  4. L'alternance ou la démagogie selon Jean-Luc Mélenchon, par Natacha Polonyi, dans Le Figaro du 2 février 2012 (en local).

    Madame Polonyi est une journaliste du Figaro. Ancienne enseignante lassée de l'idéologie pédagogiste, elle écrit maintenant de vigoureux papiers sur le sujet. Ici, c'est le démagogue Mélanchon, candidat gauchiste à la présidence de la république, qu'elle aligne pour le compte. Mélanchon veut que les "fils d'ouvrier" aillent dans les formations supérieures. La bêtise plaît à la bêtise.

    Madame Polonyi a une très bonne critique :

    Jean-Luc Mélenchon, qui prétend défendre les classes populaires, les insulte de la pire des façons. Pire, il condamne leurs enfants à un avenir de chômeur diplômé en sociologie, quand certains pourraient réussir formidablement comme plombier ou boulanger. Autant, d’ailleurs, que des enfants de milieu favorisé, dont certains aimeraient s’accomplir dans une voie qu’ils ont choisie sans s’entendre dire par leurs professeurs : « tu as des bonnes notes, va plutôt en lycée général. »

  5. La polémique sur le multiculturalisme

    Il se trouve que le Ministre de l'Intérieur s'appelle Claude Guéant. Ce politicien est entièrement un produit de la Haute fonction publique. Il provient de la tribu socialiste et fait partie des transfuges que Nicolas Sarkozy a entraîné dans sa course ... solaire. Or, voila t'il pas que Monsieur Guéant accorde un entretien à une radio matinale, entretien au cours duquel il se laisse aller jusqu'à dire que "toutes les civilisations ne se valent pas". Que n'a t'il dit le contraire ! Voilà un échantillon des vociférations qu'il recueille.

  6. Le relativisme de Claude Guéant, par Caroline Fourest dans Le Monde du 10 février 2012 (en local).

    Madame Fourest n'est pas journaliste. Elle est à la fois une hégérie du mouvement LGBT, soutenu par le délicat Monsieur Bergé, et une polémiste acharnée au jacobinisme de braise hérité de Madame de Gouges ... Bien entendu, multiculturaliste ralliée avec une passion que l'on peut résumer en une formule : "toute culture attachée à une religion doit être éliminée". Et là, Madame Fourest a l'esprit large. C'est la grande élimination : catholicisme, judaïsme, bouddhisme, ... et, pour la fin, islam. Bizarrement, tout le reste est "bon". Du lourd, mais du classique en France.

    La position de Madame Fourest est simple :

    La gauche laïque et républicaine est de retour. Du coup, une certaine droite se sent obligée de sortir l'attirail "civilisationnel" pour caricaturer le débat sur les valeurs, durcir la campagne et la droitiser.
    C'est possible. Mais, c'est oublier que le constat de l'échec du multiculturalisme date de plus d'un an. Posé par Angela Merkel, parlant de l'Allemagne, le constat est fait en Grand-Bretagne par David Cameron et moins d'un mois plus tard pour la France par Nicolas Sarkozy dans l'un de ses rares moments de lucidité.

    Quant à tenir le laïcisme pour le facteur de restauration du multiculturalisme en dérive, il faut vraiment être un partisan aveuglé par l'idéologie comme Madame Fourest pour y croire.

  7. Le concept d'équivalence des cultures serait-il un avatar de la pensée colonialiste ?, par Anne Zelensky dans Le Monde du 10 février 2012 (en local).

    Madame Zelensky est une activiste, égérie du mouvement féministe des années 1960 dont elle est une glorieuse survivante. Une conscience de gauche, le regard rivé à gauche. Et elle foudroie tout ce qui dépasse. Dans l'affaire Guéant, elle n'allait pas gâcher sa joie. Pensez ! Un ministre de la Police !

    Elle commence très sobre. Très "rue-Molitor". On fait des mines sur les mots "civilisation" un peu nauséabond selon elle, "cultures" préféré au pluriel du multiculturalisme, plus général, explique t'elle doctoralement. Bien.

    Puis, elle nous embarque dans une histoire un peu fantastique qui mêle civilisation, colonialisme, Jack Lang, le rap ou la biguine, je n'ai pas bien compris, et beaucoup d'autres choses.

    Et d'un seul coup, Madame Zelensky nous réveille :

    Quand un rappeur ivre de haine éructe sur la France, quand on insulte un "blanc", ce n'est pas du "racisme". C'est un juste retour des choses .
    Je dois reconnaître que je ne sais toujours pas si Madame Zelensky se "fout" de nous ou si elle fait du "second degré". Parce que juste après, elle se lance dans deux paragraphes vengeurs contre les associations dont le business est de taxer des pauvres types qui se sont fait "piquer" en train de dire des insanités sur des "minorités" protégées par des lois ad hoc avec la complicité de juges goguenards. Et Guéant là-dedans ? Disparu. Le sujet ? Disparu aussi. Et je découvre vaguement inquiet que je suis du même avis que Madame Zelensky.

  8. Françoise Héritier = 'M. Guéant est relativiste', entretien avec Nicolas Truong dans Le Monde du 11 février 2012 (en local).

    Je redis toujours les mêmes choses. Mais à chaque fois, c'est avec le sentiment d'être un peu plus étranger au monde fabriqué par la classe dirigeante. La classe ? Je crois que c'est plutôt un clan. Plus. Une tribu avec une dizaine de clans. Parmi ces clans, il y a celui des donneurs de leçons. Dans leur tribu, on les appelle "professeur". "Honoraire" quand ils ont donné satisfactions au conseil des anciens après trente et quarante années de bons et loyaux services.

    Alors de temps à autre, le conseil des anciens leur donne le droit de répéter les leçons qu'ils ont proféré régulièrement depuis trente ou quarante ans. D'ailleurs, ne disent ils pas eux-mêmes que l'éducation exige la répétition ?

    D'un ton professoral ne souffrant aucune contestation - malheurexu ! que dis-tu là ! - que dis-je, aucune question, Madame Héritier, qualifiée de "grande anthropologue" par le journaliste social-matérialiste Truong, au prétexte qu'elle est professeur à la retraite, va nous infliger une leçon de la grande anthropologie, qui n'a que de grands anthropologues. Le ton est lamentable, mais bien dit pour nous faire comprendre que "si toutes les cultures se valent", nous ne vaudrons jamais ce que vaut madame "le grand anthropologue".

    Que raconte t'elle ? Un torrent d'absurdités. Que les cultures se valent parce que les Nambikwara n'ont pas de tambourins et que les orchestres symphoniques ont des clochettes. Que le ministre Guéant est un relativiste parce que le relativisme consiste "à poser en pétition de principe que toutes les cultures sont des blocs autonomes, irréductibles les uns aux autres, si radicalement différents qu'ils ne peuvent pas être comparés entre eux, ..."

    Tiens, au passage. Madame Héritier commence bien sa qualification du relativisme de Guéant, lui "renvoyant" à la figure ce qu'il tenait pour une insulte : "le relativisme de gauche". Mais, elle s'égare à rebours de son chemin en trouvant que Guéant croirait que les cultures ne peuvent pas être comparées entre elles. C'est le contraire qu'il croit, que les cultures se comparent et qu'il trouve justement que le résultat de cette comparaison est en défaveur de certaines d'entre elles !

    Laissons le savant professeur poursuivre sa leçon. Elle n'a pas besoin de public. Enfin, pas du notre ...

  9. Polémique Claude Guéant : on peut préférer une civilisation sans la juger, par Vincent Verschoore dans le Nouvel Observateur du 9 février 2012 (en local).

    Vincent Vershoore est, selon ses dires, un "Blogueur, militant d’éducation populaire, intéressé par (presque) tout mais expert en rien. Cursus technique et commercial. Professionnellement indépendant. Sujets de prédilection : les économies locales, la physique et la cosmologie, le désenfumage politique et médiatique, l’éducation non formelle.". Le titre de son article est bien meilleur que son contenu. Que ne s'est-il tenu à ce bon mouvement. Malheureusement, si la glace à la vanille a ses préférences, celà n'apporte pas grand chose, dérision mise à part, au débat sur la "relation d'ordre dans l'ensemble des civilisations". Cum grano salis ...

    En réalité, le fond de la pensée de Vershoove réside dans l'affirmation que l'extrême-droite se reconnaît dans la croyance à la supériorité de "sa" culture. Ou de "sa" civilisation ... C'est selon ... Alors "préférer" ou "trouver supérieur", c'est du pareil au même, pour Monsieur Vershoove. Mais, il n'aime pas le melting-pot, Monsieur Vershoove. Par contre, il aime la glace à la vanille et ne tient pas à en dégoûter les autres, Monsieur Vershoove. Bien.

  10. Noter l'Autre est absurde, par A. COMTE-SPONVILLE, dans Le Monde du 23.02.2012 (en local).

    Monsieur Comte-Sponville est un professeur de philosophie très distingué. Il a écrit qualques articles et quelques ouvrages aux titres précieux. Personne ne les lit. Mais, ils sont obligatoirement commandés par toutes les bibliothèques municipales de France qui, du coup, n'ont jamais eu l'air aussi savant que maintenant.

    Moins drôle, maintenant. Monsieur Comte-Sponville a été envoyé au Comité consultatif national d'éthique depuis mars 2008 par des autorités dont nous ignorons tout, mais avec le mandat de mener la vie dure aux malheureux désignés volontaires pour représenter ... le Pape. Je rigole, mais en gros, c'est comme çà que Monsieur Comte-Sponville voyait paternellement son rôle, il y a deux ou trois ans, lors d'une émission sur France-Culture dont j'ai, ébahi, rendu compte en son temps (voir Sur André Comte-Sponville 'Du corps' et compte-rendu d'entretien sur France Culture du 28 janvier 2009).

    A la suite de Madame Héritier, Monsieur Comte-Sponville commence par asséner au lecteur en général et à Claude Guéant en particulier, qui en a passé l'âge, une leçon de philosophie élémentaire. Très élémentaire. Mais selon le savant professeur de Philosophie, le ministre de la Police n'a pas compris quelque chose. Ce n'est pas très clair, mais il semble que ce serait la relation d'égalité. Elle supposerait que l'ensemble des civilisations soit un corps mesurable. C'est diablement savant. Mais c'est faux.

    Et c'est faux sans aucun intérêt. Ni pour les civilisations, ni pour le ministre de la Police, qui n'a, lui, pas besoin d'être aussi savant que Monsieur Comte-Sponville pour diriger la Police.

    Monsieur Comte-Sponville est faux dans la polémique sur les valeurs des civilisations, ou des cultures au gré de son épiderme. Mais il nous révèle quelque chose qu'on avait tous bien comprise mais qui souffre toujours répétition. C'est par là qu'il conclut ce avec quoi il aurait dû commencer :

    Etre "relativiste de gauche", pour parler comme ce dernier (Monsieur Guéant), c'est penser qu'une civilisation relativiste, laïque, démocratique, féministe et humaniste vaut mieux qu'une civilisation absolutiste, théocratique, fascisante, phallocratique et xénophobe.
    C'est exactement le sens de la déclaration de Monsieur Guéant. Ces faquins sont tous d'accord pour ce régime totalitaire, absolutiste, athée, qui hurle à plein gosier d'ivrogne son hymne préféré "... qu'un sang impur abreuve nos sillons!". Xénophobe et qui nous donne des leçons de "morale".

    Monsieur Comte-Sponville n'est pas encore de l'Académie.

  11. Le différentialisme de M. Guéant, par Karim Amellal, dans Le Monde du 23 février 2012 (en local).

    Monsieur Amellal est de Sciences Po'. Il ne réfère pas à Lévy-Strauss, comme Comte-Sponville ou Héritier, mais à Taguieff. On a les référents qu'on peut. Monsieur Guéant - pardon, l'accusé Guéant, le supect Guéant, que dis-je, le criminel Guéant - n'est plus un relativiste qui s'ignore ou un relativiste de droite. C'est carrément un nazi d'extrême-droite colonaliste. Sauf que le nazisme est de gauche et que le colonialisme est une invention de la gauche. Mais, c'est un point qui échappe bien sûr à Monsieur Amellal parce qu'il est "de Sciences Po'". Le colonialisme, c'est l'exploitation commerciale des colonies et çà, c'est Jules Ferry. Le colonialisme c'est le triomphe du Blanc qui amène l'hygiène avec la Science et çà c'est Millerand. Socialisme 1881 et socialisme 1920.

    Monsieur Amellal pense que la polémique Guéant - Letchimy est simplement un révélateur "de la stratégie Buisson de reconquête en vue du premier tour d'un maximum d'électeurs du Front national. Non, il n'y a pas de polémique inutile." nous dit Monsieur Amellal. Bien.

  12. Sur la présidentielle

  13. Europe et démocratie : l’illusion référendaire, par Sylvie Goulard, député européen dans Le Nouvel Obs' du 28 février 2012 (en local).

    Madame Goulard est une européiste fédéraliste convaincue. Ici, elle plaide en faveur d'une Europe toujours plus unie et d'un accroissement de la "démocratie", par la participation effective des citoyens européens à leur politique. C'est toujours les idées politiques les plus fausses qui triomphent dans l'espace médiatique et les idées de Madame Goulard sont triomphantes.

    Sur une république des peuples, les jacobins de 1792 n'avaient pas d'autre idée quand ils lançaient les bataillons d'émeutiers à l'assaut de l'Europe, élan dévié par Bonaporte. Lui aussi voyait une Europe unie des peuples, jusqu'à l'Oural et la maladie l'a empêché de triompher. Nul ne s'en est jamais plaint.

    Par contre, Madame Goulard a une tirade éclairante sur la présidentielle franchouillarde :

    De tout cela (les idées fausses de Madame Goulard), hélas, il n’est guère question dans la campagne pour l’élection présidentielle. Ce sont des sujets trop troublants pour ceux qui croient concourir à une fonction suprême mais devront découvrir qu'en matière économique, ils ne seront que l’un des 17 joueurs de l’équipe euro.
    S'il n'y avait qu'en matière économique ... Mais, Madame Goulard trouve là l'explication de la médiocrité incroyable du personnel politique qui se présente au suffrage des français. A quoi sert donc de s'investir pour diriger un Etat qui était, aux dires mêmes de ses gouvernants, virtuellement en faillite il y a déjà quatre ans, un Etat croupion qui fournit des supplétifs aux Américains et obéit servilement à une bureaucratie buxelloise.

3 - La crise économique

  1. Perturbations dans l’innovation par Francis Pisani dans Le Monde du 4 février 2012 (en local).

    Monsieur Pisani est un journaliste indépendant qui a un blog sur Le Monde et à qui Le Monde a demandé un papier sur l'innovation. Son papier est suggestif.

    Très souvent, les économistes sont exaspérés par les ingénieurs. Ils opposent les inventions des ingénieurs qui ne servent à rien à leurs innovations qui, elles, ont un marché. C'est très injuste, mais toujours très efficace pour critiquer la tâche des inventeurs.

    Mais, Monsier Pisani semble surestime l'importance de la Silicon Valley. Et de l'Internet. C'est une affaire entendue, la fabrication des puces électroniques a fait la gloire de la Silicon Valley et la Silicon Valley vit de la formidable emprise de l'Internet dans le monde. Mais la part dans l'économie de ces deux activités nouvelles est somme toute marginale. Elles me paraissent d'ailleurs beaucoup plus inventives qu'innovantes ...

    Comprenons nous. J'ai bien conscience que, sans la communication numérique, le commerce ne serait pas ce qu'il est. Mais, l'agriculture, l'extraction minière, la production d'énergie, la mécanique, l'électricité, la chimie, la pharmacie sont des activités économiques qui, dans leur ensemble, sont bien plus importantes. Ainsi, plusieurs auteurs soulignent que les nouvelles techniques n'ont pas remplies leur objectif de créer "les emplois de demain". Et elles n'ont pas remplacées de "vieilles techniques" comme l'automobile ou l'aéronautique. Et fort étrangement, les hommes ont toujours besoin de manger de la viande rouge et des légumes ...

    Aussi l'innovation est plus aujourd'hui dans l'agro-alimentaire ou la mécanique que dans les techniques nouvelles, lieu de l'invention gratuite et fantaisiste. Pour notre plus grand bonheur. D'hommes rassasiés, ce qui ne se fait pas comme çà...

  2. Equilibre structurel versus règle d'or, par Bernard Schwengler dans LEMONDE.FR du 09 février 2012 (en local).

    Monsieur Schwengler est professeur d'économie. Nous avons été souvent critiques à l'encontre des professeurs. Et très injustes. Parce que le texte de Monsieur Schwengler est à la fois très convaincant et très clair. Il fait partie des partisans de la "règle d'or" qui est une règle impérative qui s'applique au gouvernement et au Parlement de ne pas prendre de mesure qui engage les finances publiques au-delà d'un certain risque.

    Nous avons déjà dit combien ce genre de règle nous semble avoir le même statut que les promesses électorales qui n'engagent jamais que ceux qui les écoutent. A ce "détail" près, Monsieur Schwengler, sur la base de l'exemple étourdissant de la Suède, nous explique que la règle d'or exprimée en termes de budget est sans intérêt alors qu'exprimée en solde structurel, elle devient efficace. Bien.

    Le solde structurel de Monsieur Schwengler est celui qui est dégagé, non pas sur la simple durée d'un budget annuel, mais sur celui d'un cycle économique complet. Simplement dit, en période de récession, le budget annuel peut être négatif, mais il est obligatoirement positif lorsque la croissance est là de sorte que sur la période du cycle complet croissance - crise, le solde cumulé est nul.

    Je crois que Monsieur Schwengler se trompe gravement, mais doctement. En celà il est vraiment un professeur. Il suppose plusieurs choses qui ne me semblent pas acquises. La première, c'est que l'on connaisse à l'avance la phase et la période du cycle. On sait que cette connaissance est impossible. Le comportement de l'économie est fondamentalement chaotique.

    Une deuxième chose non acquise est celle de la cause de la croissance et celle de la crise. Or, déterminant la règle de gestion de l'Etat sur la base de cette connaissance, Monsieur Schwengler exonère l'Etat de la responsabilité de la crise. Il peut largement l'exonérer de celle de la croissance, bien que l'Etat sache parfaitement étouffer toute croissance, par l'impôt notamment. Depuis plusieurs décennies, à cause du taux de prélèvement et d'une redistribution parfatement inadmissible, l'Etat est évidemment LE grand responsable de la crise.

    Enfin, reporter à dix ou vingt ans, période économique "naturelle", l'échéance de l'équilibre visé doit faire soupirer d'aise nos hommes politiques exonérés de toute responsabilité. Vingt ans ! Le rêve quand le mandat est de cinq ans ! C'est pas moi, c'est lui !

  3. Pourquoi la France manque-t-elle d'ingénieurs et de scientifiques ?, par Daniel Bloch, dans Le Monde du 22 fvier 2012 (en local).

    Monsieur Daniel Bloch est à la fois un expert et l'un des acteurs du monde très spécial de l'enseignement supérieur. Le titre de son article ne correspond pas vraiment à son contenu.

    Si je comprends bien Monsieur Bloch, et je peux me tromper, la France a un excellent système d'enseignement supérieur. Elle ne peut donc pas manquer d'ingénieurs et de scientifiques. Et pourtant, d'après l'OCDE, nous dit Monsieur Bloch, elle manque d'ingénieurs et de scientifiques. Où est le problème ?

    Il semble que ce soit parce que la filière technologique est insuffisante. "C'est pas moi, c'est les autres" nous déclare le vaillant fonctionnaire de l'Enseignement supérieur. C'est possible. Mais, on ne comprend pas bien pourquoi. Si les ingénieurs et scientifiques sont formés excellement par l'Enseignement supérieur de Monsieur Bloch que vient faire la filière technologique dans le débat ?

    Je crains que nous ne comprenions pas tout ce que nous dévoile Monsieur Bloch, moi le premier. Depuis quelques années, il me semble qu'un nombre de plus en plus élevé d'ingénieurs et de scientifiques ne font plus le métier d'ingénieur, ni même de scientifique. Peu à peu, avec la massification de ces professions autrefois élitistes, on s'est habitué à ce que leurs tâches soient morcellées et peu à peu à réduire leur liberté de décision dans toutes les entreprises.

    De ce fait, l'OCDE qui se moque comme de l'an quarante de l'élitisme des ingénieurs ou des scientifiques et de leurs peines de coeur de ne plus être leurs propres maîtres, tente d'imposer un nouveau modèle. Les ingénieurs et les scientifiques doivent peu à peu devenir les OS de l'économie moderne. Partant, il n'est pas sûr que l'excellence, bien entendu promue par l'enseignement supérieur de Monsieur Bloch, serait encore adaptée à la tâche qui était attribué autrefois aux ingénieurs et scientifiques avant que l'OCDE ne s'en mêle. Et le souci de Monsieur Bloch au sujet de la filière technologique est une sorte d'aveu qu'il a compris ce message.

    Aveu, parce que l'OCDE se moque à peu près complètement que l'ingénieur matricule XR4352 qui va développer le composant 3765 sous le contrôle du chef YT65, lui-même sous l'autorité du comité d'experts AD2, ait fait Centrale de Sceaux ou celle de Fleury-Mérogis ... De toutes façons, il obéira au comité AD2 ...

  4. Compétitivité externe, le French Paradox, par Alexandre Kojève, pseudonyme regroupant un collectif de responsables privés et publics du développement international, dans Le Monde du 20 février 2012 (en local).

    Je n'aime pas les "collectifs" quand ils se mêlent de dire la science. Ou de revendiquer je ne sais quel avantage. Ici, l'article est ramassé et traite également les grandes entreprises que les PME, l'international que le marché national. On retiendra des mesures encourageant la participation de l'état à l'internationalisation des grandes entreprises. Et ces mesures seraient équilibrées par l'engagement des grandes entreprises de favoriser les sous-traitants du marché national, ls entraînant du même coup à l'internationalisation.

    C'est pas bête. Mais, on peut craindre que cet interventionisme ne soit pas "naturel" et qu'il soit rejeté par l'organisme "économique" comme un corps étranger. Voir.

4 - Des affaires religieuses

    4.1 - Le duel entre Obama et les évêques américains sur le remboursement de la contraception

    L'administration Obama, lassée par les arguties des catholiques qui tentent tout pour ne pas admettre la contraception dans leurs institutions, les a mis en demeure par une loi nouvelle de se conformer à la règle impitoyable du remboursement des frais de contraception. L'Eglise refuse. Le problème d'Obama c'est qu'il se présente à l'élection présidentielle de 2012, et que le mécontentement des évêques pourraient freiner le cote catholique en sa faveur. Que va t'il se passer ?

    Plusieurs auteurs "catholiques" en rient d'avance.

  1. Did the bishops forget about women?, par Jon O'Brien dans The Washington Post du 10 février 2012 (en local).

    Monsieur O'Brien est le propriétaire d'une association progressiste qui se déclare catholique, Catholics for choice. Il est essentiellement tendu vers l'éradication du catholicisme aux Etats-Unis. Ses déclarations insupportables à l'encontre des évêques se récitent sans se commenter :

    • il trouve étrange que la contraception fasse partie de la "liberté religieuse" des évêques qui ont fait voeu de chasteté ;
    • Comme en toute matière morale, contraception comprise, l'Eglise enseigne ce qui lui plait et les individus décident en conscience.
    • Les évêques décident qu'il est interdit de rembourser les frais de contraception des femmes catholiques qui le pratique à plus de 98%. C'est intolérable.

  2. The Obama contraception compromise: A model to end the ‘war on religion’?, par Susan Brooks Thistlethwaite dans The Washington Post du 10 février 2012 (en local).

    Madame Susan Brooks Thistlethwaite est une théologienne unitarienne de Chicago.Elle est membre d'un think tank progressiste le Center for American Progress. Parlant de cette opposition des évêques catholiques, elle considère qu'il s'agit d'une bataille dans la guerre des cultures engagée depuis très longtemps. Mais, selon elle, le progressisme a fait des progrès considérables parmi les laïcs catholiques. Du coup, elle sait que les progressistes catholiques savent à quoi sen tenir sur leur responsabilité en matière de contraception, que Madame Thistlethwaite appelle "responsabilité reproductive" ...

    Conscience and common ground. It’s possible for there to be peace between us over religious differences. Morale et valeurs communes. Il est possible d'être pacifique entre nous sur la base des différences religieuses.
    C'est exactement l'intention profonde des progressistes lors du Concile Vatican II : parvenir une cogestion du monde. Et nous le voyons. Il n'y a aucune chance pour le catholicisme intégral. D'ailleurs, la coopération avec le monde n'est pas dans sa nature.

  3. In defense of the Catholic Church, par Sara Perla, in The Washington Post du 22 février 2012 (en local).

    Sara Perla est une catholique célibataire, qui insiste sur le fait qu'elle est chaste. Elle s'oppose aux opinions de O'Brien. en soutenant les évêques catholiques. Elle affirme que les évêques ne constituent pas un groupe vivant dans un monde clos, ignorant des laïcs catholiques en général et des femmes catholiques en particulier. Madame Perla témoigne de ce que les évêques, individuellement et collectivement, sont très attentifs aux conseils et aux avis des laïcs, hommes ou femmes. Elle note fort justement que les évêques ne sont pas des chefs d'entreprise, mais qu'ils exercent leur responsabilité au service du bien des fidèles. Dans cette mesure, ils disent la Parole de Dieu et le monde sait de ce fait à qui s'adresser pour recevoir cette Parole.

    Enfin, Madame Perla note que l'opinion de O'Brien selon laquelle en fin de compte, sur la question de la contraception, c'est la conscience individuelle qui décide. Madame Perla faut une remarque bien difficile :

    As any student in my class could tell you, the conscience can make mistakes and must be formed correctly. Comme tout étudiant de ma classe pourrait vous le dire, la conscience peut faire erreur et doit être correctement formée.
    Nous savons hélas que c'est là où les sécularistes comme O'Brien trouvent leur proie. Et le laïcisme est justement depuis Jean Jaurès le mouvement qui veut empêcher la formation de la droite raison par l'Eglise catholique en la confiant à des instituteurs rationalistes, c'est-à-dire dont le sens moral est dévié par l'esprit du monde. Ainsi, de très nombreuses personnes sont assurées que le bien est toujours le choix de la consience individuelle libre, c'est-à-dire libérée des préjugés religieux.

    A nouveau, on touche là et les limites de l'aggiornamento catholique des années 60 et le coeur du fiasco épouvantable que le Concile Vatican II aura historiquement été et que démontre O'Brien et son association.

    4.2 - Le choc du christianisme avec la société sécularisée

  4. In New York City, does church-school separation go too far?, par Charles Haynes, dans The Washington Post du 23 février 2012 (en local).

    Il ne s'agit plus ici de la réaction des évêques catholiques au financement obligatoire de l'avortement et de la contraception, mais d'une querelle qui oppose une sorte de conseil municipal américain avec une secte protestante.

    D'abord, le terme de secte aux Etats-Unis ne répand pas les odeurs nauséabondes qu'on nous a imposé en France avec le militantisme douteux des laïcards qui tentent de restreindre autant qu'ils peuvent la vie religieuse en France. Aux Etats-Unis, une secte est habituellement un groupe religieux dont le nombre de membres peut être réduit à quelques unités. Après, qu'elle se livre à des activités illégales est un autre problème.

    Le groupe religieux avait l'habitude depuis plusieurs dizaines d'années de tenir des services religieux dans une école publique. Ceci paraît insupportable à la majorité laïcarde du conseil municipal qui multiplie les actions en justice pour interdire l'accès de la secte à l'école publique. Malgré la jurisprudence de la Cour Suprême qui note que si d'autres groupes que des groupes religieux ont accès à une école publique, alors l'école publique doit accorder un accès égal à ces groupes religieux.

    Charles Haynes note avec quelque raison :

    Separating church from state is essential for religious freedom. But when taken too far, “separation” sends a message of government hostility toward religion. La séparation de l'église et de l'état est essentielle à la liberté religieuse. Mais quand çà a trop loin, la "séparation" envoie un message d'hostilité du gouvernement vers la religion.
    Une fois de plus, la notion de liberté religieuse est douteuse et les qualités de la séparation de l'église et de l'état ne sont pas évidentes en toutes circonstances. Mais ce serait un autre débat. Par contre, et les laïcards sont insensibles à l'argument, l'invocation permanente de la séparation de l'église et de l'état finit par changer la prétendue neutralité "religieuse" de l'état en pure hostilité. Et la chose vaut bien sûr en France nous semble t'il.

  5. Debate about lesbian denied Communion shows dispute about the rite, par Michelle Boorstein, dans The Washington Post du 29 février 2012 (en local).

    De quoi s'agit'il ? Dimanche dernier, une dame catholique enterrait à l'église sa mère âgée de 84 ans. Se présentant à la Communion, elle reçut l'affront de se faire refuser par le prêtre de la paroisse. Motif ? Lesbienne. D'où débat.

    Dans son article, Michelle Boorstein, journaliste des affaires religieuses au Washington Post, ne retient pas dans le débat le problème en soi de l'homosexualité. Pour les besoins de la cause, elle admet la prohibition de l'homosexualité édictée par l'Eglise catholique romaine. Il est bien clair que la position de Boorstein est bien différente.

    Mais, c'est là où l'on perçoit l'immense différence entre un journaliste partisan aux Etats-Unis, et un journaliste partisan en France. L'américain est capable d'abstraire les conflits. Le français s'y vautre. Vers quoi déplace donc Madame Boorstein ?

    Son idée est que, à tous les niveaux de l'Eglise catholique romaine, il existe une grande diversité d'opinions au sujet de l'Eucharistie et de la Communion et donc de l'admissibilité d'un fidèle à la Communion. Elle cite la position du Cardinal Wuerl, qui se trouve être l'Archevêque du prêtre qui a refusé la Communion à la dame. Le Cardinal Wuerl a indiqué bien avant l'affaire :

    The policy in the Archdiocese of Washington, as established by Cardinal Donald Wuerl, is not to withhold Communion ... La politique de l'Archidiocèse de Washington, telle qu'établie par le Cardinal Donald Wuerl, est de ne pas empêcher la Communion ...
    La position du Cardinal Mahonny est typiquement la même, ayant déclaré que l'accès à la Communion dépend de la conscience du fidèle et celui qui distribue la Communion n'a pas à s'en mêler.

    Dans le même ordre d'idées, interrogés par Madame Boorstein, plusieurs théologiens ont indiqué qu'ils connaissaient l'interdiction de recevoir la communion en état de péche mortel, mais qu'ils ignoraient encore aujourd'hui ce que pouvait être un péché mortel. En effet, ces théologiens savent que le péché mortel sépare de Dieu et ils se demandent quelle gravité de péché pourrait bien séparer de Dieu.

    Pour conclure au sujet de l'article de Madame Boorstein, extrêmement rusé ( l'article pas la dame ...), on pourrait dire :

    1. Madame Boorstein a habilement changé le débat pour l'emmener vers un débat plus général, moins circonstantiel.
    2. Elle a très habilement ouvert la perspective du nouveau débat sur la question du péché de façon à faire disparaître le débat dans l'unanimité des experts de la question !
    Du grand art.

  6. Why we need college degrees more than we need faith par Lawrence M. Krauss dans un blog religieux du Washington Post du 28 février 2012 (en local).

    Monsieur Krauss est un auteur de pamphlets anti-religieux. A chaque édition, la campagne électorale aux Etats-Unis suscite la vindicte de tels individus. L'intérêt de leur verbiage est de souligner un point religieux qu'on avait jusqu'à présent mal perçu.Ils sont alors l'occasion de réfléchir, ce qui n'est jamais bon ...

    Entraîné par l'indignation, Monsieur Krauss a cru comprendre qu'un candidat voulait renforcer dans l'éducation le "poids" de la religion. C'est pour lui l'occasion de marteler quelques ... "vérités" - et qu'est-ce donc que la "vérité" ... . Cherchant à être désagréable, Monsieur Krauss note que 90% des membres de l'Académie des Sciences des Etats-Unis ont déclaré "être sans religion". C'est possible. Et quand on a demandé à Saint Pierre s'il connaissait "cet Homme là", il a répondu qu'il ne Le connaissait pas. Trois fois. Monsieur Krauss pourrait donc vérifier au moins trois fois les affirmations de ces hommes de science. La quatrième est souvent la bonne.

    Nous sommes ainsi faits que, sur la tarte aux pommes, nous pouvons tout dire. Mais sur Dieu, si l'on nous interroge, c'est le voile noir. Nous devenons stupides. Parce que c'est la vérité.

    Monsieur Krauss en conclut que, s'il faut choisir entre l'éducation et la religion, eh bien c'est l'éducation qu'il faut choisir. C'est idiot. Mais c'est si bien balancé.

    Maintenant, c'est vrai que c'est bizarre ces aéropages d'athées militants dès qu'il y a un groupe quelconque, que ce soit pour la biologie ou la gastronomie, la physique ou les randonnées dans le Larzac, les mathématiques ou la plongée sous-marine, les Belles-Lettres ou la pétanque. Quand on regarde en France, on se demande où ils sont les chrétiens ? Dès qu'ils sont sortis de l'église, plus personne.Et pourtant, grattez un peu, et s'ils ne le sont pas tous ...

  7. On note l'absence complète d'opinions religieuses publiées en France ce mois-ci.

Revue THOMAS (c) 2012