Aspects du jacobinisme hollandiste

Aspects du jacobinisme hollandiste

Philippe Brindet - 29.12.2012

L'affaire Depardieu

L'acteur Gérard Depardieu, que l'on qualifie de "monument du cinéma français" eu égard à sa filmographie, dont l'ampleur et la notoriété sont sans égales, s'est installé en Belgique, dans un petit village frontalier à quelques centaines de mètres dit-on du territoire français. A cette annonce, l'incrimination d'évasion fiscale a été proférée. L'affaire Depardieu pouvait commencer.

Le mépris français des principes européens

Rien ne pouvait l'arrêter. Pourtant, la France a adhéré à une suite de traités internationaux et d'autres actes, parfois douteux, par lesquels elle abandonnait une part de plus en plus importante de sa souveraineté et, elle a adhéré au principe de libre circulation des citoyens européens, et au principe de leur libre installation partout dans l'Union.

Ces principes pourtant transcrits dans la Constitution française sur laquelle ils priment, ne sont jamais ou pratiquement jamais rappelés aux adversaires de Gérard Depardieu.

L'oppression fiscale hollandiste

L'acteur outré de la polémique, a été contraint d'expliquer un acte de liberté par la révolte contre un acte de spoliation qu'il éprouvait du fait de la fiscalité confiscatoire pratiquée par l'administration installée par François Hollande depuis sa récente accession au pouvoir en mai 2012. Depardieu a cité un chiffre de 85% de prélèvements qui fit rire certains de ses adversaires, persuadés qu'un tel taux était impossible. Plusieurs avocats fiscalistes répliquèrent en citant l'existence de plusieurs de leurs clients dont le revenu était taxé à plus de 100%.

Plus grave encore, il s'est un peu mieux démontré ce qui se murmurait parfois. Les français ayant une certaine richesse et ayant une activité économique en France fuyaient leur pays pour la même raison fiscale. On a cité des noms comme ceux du plus grand milliardaire français, Bernard Arnault, réputé s'installer lui aussi en Belgique. Beaucoup d'autres noms de la finance, de l'industrie, du commerce et des arts ont ainsi été révélés.

Le hollandisme n'opprime pas que les capitalistes ...

De fait, les travailleurs, c'est-à-dire les personnes dont le revenu est principalement produit par leur travail sous forme d'un salaire (emploi salarié) ou d'honoraires (travailleur indépendant) et non pas sous forme de dividendes ou de redevances de droits (cas des investisseurs et des artistes) sont assujettis à un nombre d'impôts absolument incroyable. Depuis quelques années, il a été impossible de cacher notamment que les soi-disantes assurances sociales n'étaient pas autre chose qu'un impôt perçu par l'Etat au nom d'un principe détestable de redistribution étatique. En réalité, de la redistribution, il y en a très peu, et les économistes d'Etat se livrent à des "prouesses" verbeuses pour démontrer l'inadmissible.

Le taux global d'imposition d'un travailleur est en pratique très largement supérieur à 85%. Mais, le travailleur ne le sait pas forcément, n'en a pas réellement conscience, quand il paye la TVA ou encore que son employeur prélève directement les charges sociales qui représentent déjà 82% de son salaire net !

Comme il s'agit d'un argent qu'il n'a jamais vu, le salarié croit qu'il s'agit d'un impôt du "patron" dont il se moque éperdument .... Erreur fatale qui explique hélas les succès électoraux des deux partis de gauche socialiste au pouvoir depuis cinquante ans, les actuels PS et UMP.

Le hollandisme n'a fait qu'empirer l'oppression fiscale

UMP. Parce qu'il faut souligner que l'émigration fiscale n'est pas un phénomène qui date du 6 mai 2012, jour de l'élection funeste de François Hollande. Elle était déjà extrêmement élevée avant elle, malgré les dénégations de l'administration sarkozyste, les émigrés fiscaux n'ayant aucun avantage à protester contre leur affirmation. Et malgré quelques mesures, non négligeables, comme la création du "fameux" bouclier fiscal, le taux de prélèvement était déjà fabuleux.

Il y a, à mon avis, un autre problème qui complique encore l'analyse de l'oppression fiscale opérée par l'administration hollandiste. C'est que la fiscalité des autres pays, européens en l'occurrence, est elle-même extrêmement élevée. De sorte que le gain de l'émigré fiscal français n'est pas toujours des plus évidents. On a bien dit qu'en Belgique, et je crois que c'est seulement dans certaines régions de la Belgique, il n'y avait pas d'impôt sur la fortune et que le taux d'imposition des héritages était considérablement plus faible qu'en France. Celà paraît un avantage fabuleux et digne d'attirer l'émigration fiscale. Mais, il existe en Belgique comme ailleurs en Europe, d'autres impôts et prélèvements qui relèvent l'addition fiscale. L'ensemble est tel que la pression fiscale globale n'est pas en réalité la seule motivation à l'émigration fiscale provenant de France.

Il y a un autre problème.

La réaction hollandiste est jacobine

L'acteur Gérard Depardieu, insulté par les membres de l'administration hollandiste, le premier ministre Ayrault le premier, se senti obligé d'écrire une lettre ouverte à ce dernier dans laquelle il expliquait les raisons de son émigration fiscale. Face à l'argument misérable du premier ministre incriminant chez l'acteur émigrant un manque de "patriotisme", Depardieu, s'il soulignait le caractère insupportable de la pression fiscale, insistait sur le défaut absolu de reconnaissance par la France du talent et de la création, et à ce propos, ce n'était pas seulement pour lui que l'acteur se plaignait.

Pour Depardieu, non seulement l'oppression fiscale est spoliatrice, mais de plus elle exprime la haine de l'administration hollandiste pour ceux qui ne sont pas les égaux du patriote nul et médiocre, qui n'a jamais rien apporté à l'humanité, qui se contente de vivre et de recevoir les subsides de l'"état paternel". Depardieu place ainsi son émigration très clairement dans le mouvement de ceux qui, en 1789 déjà, dès le lendemain des exactions de la Bastille, avaient compris que leur différence les désignait à l'oppression, leur rendant la vie impossible.

Et de fait, ceux qui restèrent moururent de morts violentes, les uns de la guillotine, les autres de noyades, brûlés comme les vendéens dans les fours à pain ou égorgés par les bandes avinées de patriotes comme Flesselles, le prévôt des marchands de Paris.

A nouveau insulté par un citoyen, acteur lui-même, Philippe Torreton, Depardieu fut alors défendu par une actrice, au moins aussi célèbre que lui, Catherine Deneuve. Et cette dernière, interpellant le jacobin Torreton, évoque clairement la révolution de 1789 et ses égorgeurs. Dans l'esprit de Deneuve, il ne s'agissait plus depuis longtemps d'une question technique de comptabilité fiscale. Et elle était inconsciemment guidée dans cette qualification par le prétendu "défaut de patriotisme" démontré par l'émigration de Depardieu aux dires de Ayrault, lui-même.

La référence à la Terreur jacobine qui régnait par la dénonciation du même défaut de "patriotisme", fut alors reprise plusieurs fois et, fait notable, par Laurence Parisot, qui se trouve être en quelque sorte le successeur du Flesselles prévôt des marchands, égorgé, puisqu'elle est présidente du Medef, le syndicat des patrons du commerce et de l'industrie.

La référence au jacobinisme révolutionnaire n'est donc pas le fait de "nostalgiques" d'une Histoire de France de plus en plus mal connue d'ailleurs. Elle est le fait de personnes qui ont une part active dans la société. Elle n'en est que plus inquiétante.

Le concours des clubs est essentiel au jacobinisme

Si on se réfère encore à l'Histoire de la révolution, on se souvient combien le noyautage de la société française par les clubs jacobins, établis partout en France, fut essentiel pour anesthésier le bon sens critique des français. L'effrayante loggorhée des clubs est aujourd'hui revendiquée par un certain nombre de gens qui se croient obligés en conscience de propager l'idéologie oppressive de l'administration hollandiste.

Ainsi, un individu parfaitement obscur, mais doté d'un potentiel de nuisance dans les médias et le cinéma, se crût obligé de publier un nouvel article insinuateur contre Depardieu, article selon lequel les acteurs français sont trop payés et trop payés grâce au système de subvention français au bénéfice du cinéma français.

C'était bien entendu Gérard Depardieu qui était visé, accusé par le jacobin de service d'être un ennemi du peuple parce qu'il avait profité des largesses du système, dont le dénonciateur vit d'ailleurs grassement.

Et c'est là le mécanisme insinuateur, typique des clubs jacobins, qui consiste à toujours lancer une accusation supplémentaire et à ne jamais lâcher une proie, ici Gérard Depardieu, tant qu'elle n'est pas anéantie. Il s'agit d'un mécanisme essentiellement terroriste qui consiste à instiller la peur dans la société française. Parce que, pour un Depardieu tombé, c'est cent, deux cents ennemis du peuple que les jacobins ont effrayés, rendus esclaves de leur oppression.

Et c'est dans l'opiniatreté des attaques, d'abord verbales, que se trouve la force terrible du jacobinisme en tant qu'il est d'abord un terrorisme intellectuel. Et les clubs patriotiques, cachés dans la société française, se révèlent dans l'affaire Depardieu par des hommes comme Ayrault ou Torreton, qui "dénoncent" les ennemis du "civisme patriotique".

L'être humain est ici simplement en danger. Nous le savons de l'Histoire.

La Révolution s'annonce en chantant ...

Tout le climat politique et médiatique actuel montre en France la montée des moyens d'une véritable révolution sanglante. Faillite financière de l'Etat, crise économique subie par la majorité de la population, présence d'une population déclassée prête aux pires exactions, quadrillage de la société par des clubs patriotiques revendiquant une idée civique et patriotique, émigration des élites, ...

La place de la Révolution est faite. Quand s'ouvrira t'elle ? Elle est peut-être commencée. Nous attendons seulement la chute de la médiocre bastille. Son symbole.


Revue THOMAS (c) 2012