Un boxeur démontre comment les pièges d'Internet sont retournables

Un boxeur démontre comment les pièges d'Internet sont retournables

Philippe Brindet - 13.03.2013

Les pièges des réseaux sociaux

Les réseaux sociaux présentent des dangers absolument majeurs pour la santé mentale de leurs adhérents. On ne compte plus les suicicides provoqués par les rumeurs et les calomnies, parfois par les simples médisances et plaisanteries vulgaires. On en déduit, surtout quand on n'est pas adhérent de tels réseaux, à leur parfaite nocivité.

Pourtant, de nombreuses personnalités intègres se sont inscrites sur de tels réseau, à l'instar du Pape maintenant émérite, Sa Sainteté Benoît XVI. Il est donc difficile de soutenir que les réseaux sociaux sont définitivement et intrinsèquement pervers pour parler un très vieux langage bien connu.

Il n'en reste pas moins vrai que la vulgarité, l'effronterie, l'intempérance d'un nombre considérable de membres des réseaux sociaux sont absolument effrayants. Les personnes faibles sont impitoyablement prises pour cibles par des individus pathétiques de couardise, protégés par l'anonymat.

L'efficace méthode de Curtis Woodhouse

Curtis Woodhouse est un boxeur anglais. Il a récemment été la cible d'un membre de son réseau social qui lui écrivait publiquement des petits billets qui contenaient des déclarations comme "Prends immédiatement ta retraite. ", ou "T'es une honte totale.".

Bien entendu, l'individu auteur de cette avalanche de plaisanteries douteuses reste anonyme, protégé par son pseudo. Il semble pratiquement exclu de faire cesser les actes d'un tel individu. Découragés, beaucoup renoncent ou pire, subissent la pression ininterrompue de ce genre d'individus, encouragés par l'impunité.

Curtis Woodhouse a trouvé une méthode toute simple. Il a simplement demandé aux membres de son réseau que celui qui connaissait l'adresse de l'individu la lui indique et qu'il se proposait de lui rendre visite pour s'expliquer. L'individu s'est confondu en excuses et a supprimé tous ses messages injurieux.

L'histoire ne dit même pas si un autre membre a "donné" l'adresse de l'individu. La seule crainte que cette adresse soit révélée a suffi à calmer les ardeurs si peu contrôlées de l'individu. On note que, comble du raffinement, Curtis Woodhouse possédait une photo de la rue dans laquelle habitait son persécuteur. Et Curtis Woodhouse a très habilement publiée sa demande de renseignement avec cette photo !

Sur quelques questions soulevées par la méthode de Curtis Woodhouse

Comme beaucoup, on peut apprécier la méthode de Curtis Woodhouse qui permet de "responsabiliser" les pratiques inciviles sur les réseaux sociaux. Mais, il existe du coup plusieurs questions qui ressortent du débat sur Internet et sa pratique.

  1. L'anonymat est la cause de l'irresponsabilité sur Internet :

    Oui. C'est possible, mais pas absolument incertain. Si c'est un boxeur qui est en bas de chez vous pour vous demander des comptes, vous avez une certaine attitude rationnelle qui va dans le "bon sens". Mais, si c'est vous le boxeur et que la personne qui réclame en bas de chez vous est une vieille dame débile et crachotante, que se passera-t'il ? Nous n'en savons rien. La méthode de Curtis Woodhouse est "infaillible", non pas parce qu'elle "casse" l'anonymat de l'insulteur, mais parce que Curtis Woodhouse est un costaud ...Il y a mieux comme mode civil de réglement des contentieux ...

  2. Il y a conflit entre ce qui est recherché positivement sur les réseaux sociaux et l'ouverture à un trop grand nombre :

    Le problème d'Internet c'est qu'il est largement ouvert à tous alors que, lorsque j'ouvre un réseau social, je recherche essentiellement à rassembler mes "amis" autour de moi. C'est comme celà que Facebook, me semble t'il, attire des centaines de millions de gens affamés de proximités amicales. Or, il semble que l'expérience montre que, selon les cultures, cette proximité amicale ne soit pas recherchée par tous. Je veux dire que si toute personne a envie de se constituer un réseau d'amis, elle n'avouera pas forcément d'emblée qu'elle dispose d'un réseau implicite de gens qu'elle déteste ou qu'elle va détester. Or, si vous offrez un espace universel, vous mélangerez immédiatement les amis et les ennemis.

    Bien entendu, les "réseaux sociaux", je veux dire les plateformes informatiques qui permettent de constituer des réseaux sociaux - et il est symptomatique qu'on confonde souvent le media et le message ... - ont prévu le cas et vous disposez de moyens pour accepter ou refuser des "amis". Mais, alors que ce mécanisme de filtrage paraît parfaitement efficace, l'universalité de la plateforme crée implicitement des "sur-réseaux sociaux" qui fait que votre "micro-réseau" d'amis appartient à plusieurs "sur-réseaux". L'un d'entre eux est en fait réalisé par les "amis" de vos "amis" ... qui ne sont pas vos "amis" ... Et là, les mécanismes d'exclusion ne marchent plus.

Toujours est-il que la méthode de Curtis Woodhouse démontre qu'il existe des moyens efficaces contre certaines nuisances d'Internet et ces moyens ne sont pas couteux. Le fond de l'idée de Curtis Woodhouse est qu'il suffit de retourner la stratégie de son adversaire. N'est-ce pas comme dans la vie réelle ?


Revue THOMAS (c) 2013