L'Eglise, assemblée des enfants de Dieu par adoption

Philippe Brindet - 02.04.2013

La thèse catholique

Selon la tradition catholique, les hommes sont tous des créatures faites à l'image de Dieu et qui sont donc capables de vouloir Dieu, c'est-à-dire de confesser qu'Il est le seul Dieu. Mais, à cause du péché originel, nul homme ne peut parvenir au Salut que représente la relation avec Dieu s'il ne reçoit le baptême et, par la suite les autres sacrements, dont le plus notable d'entre eux, l''Eucharistie.

L'anti-thèse déduite du mouvement dit de 'l'esprit du Concile'.

A la suite de nombreux théologiens qui ont fait de grands efforts pour paraître "orthodoxes" alors qu'ils ne le sont pas, et parmi lesquels on peut citer en langue française Congar et de Lubac, et en langue allemande, Karl Rahner, il s'est fait jour un mouvement qui a interprété le fait que tout homme est destiné par Dieu à recevoir le baptême, en affirmant que tout homme est en réalité un chrétien qui s'ignore (la thèse jamais expréssément condamnée du chrétien anomyme de Rahner). Il en résulte souvent que le sacrement du baptême est compris comme la reconnaissance ou l'accueil par la "communauté ecclésiale" d'un nouveau membre. Par le baptême, la qualité d'enfant de Dieu est reconnu à celui qui le demande.

Un débat ?

La position des Congar, Lubac et Rahner et sa déclinaison dans l'Eglise concilaire est clairement une déviation de la Foi, comme lex credendi. Mais, cette déviation est essentielle pour comprendre le sens très particulier dans lequel les modernistes ont interprété le principe du Concile Vatican II d'ouverture sur le monde.

Les sources normatives du baptême

Pour en revenir aux effets du Baptême, il faudra expliquer que ce Sacrement, non seulement nous délivre, par la vertu qui lui est propre, de tout ce que l’on peut vraiment appeler les maux, mais qu’il nous enrichit encore des biens et des dons les plus précieux. Ainsi il remplit notre âme de cette Grâce divine qui nous rend justes, et nous fait enfants de Dieu, héritiers du salut éternel.
Catéchisme du Concile de Trente - Chapitre 16 — Du sacrement du Baptême (suite) § III. — DES EFFETS DU BAPTEME
Quels sont les effets du sacrement de baptême ? Le sacrement de baptême confère la première grâce sanctifiante qui efface le péché originel et aussi le péché actuel, s’il existe. Il remet toute la peine due pour ces péchés, imprime le caractère de chrétien, nous fait enfants de Dieu, membres de l’Eglise et héritiers du paradis, et nous rend capables de recevoir les autres sacrements.
Catéchisme de Saint Pie X - Le Baptême - chapitre 2
2. Née de l’amour du Père éternel [81], fondée dans le temps par le Christ rédempteur, rassemblée dans l’Esprit Saint [82], l’Église poursuit une fin salvifique et eschatologique qui ne peut être pleinement atteinte que dans le siècle à venir. Mais, dès maintenant présente sur cette terre, elle se compose d’hommes, de membres de la cité terrestre, qui ont vocation de former, au sein même de l’histoire humaine, la famille des enfants de Dieu, qui doit croître sans cesse jusqu’à la venue du Seigneur.
Source : Gaudium et Spes, CHAPITRE IV : Le rôle de l’Église dans le monde de ce temps - 40. Rapports mutuels de l’Église et du monde
Unissons donc nos énergies et, sous des formes toujours mieux adaptées à la poursuite actuelle et effective de ce but, dans une fidélité sans cesse accrue à l’Évangile, collaborons avec empressement et fraternellement au service de la famille humaine, appelée à devenir dans le Christ Jésus la famille des enfants de Dieu.
Source : Gaudium et Spes, 92. Le dialogue entre tous les hommes - Point 3
Source : Gaudium et Spes, texte complet sur le site du Vatican.
258. Pourquoi l’Église baptise-t-elle les petits enfants?

1250

Parce que, étant nés avec le péché originel, les petits enfants ont besoin d’être délivrés du pouvoir du Malin et d’être introduits dans le royaume de la liberté des fils de Dieu.
Compendium du Catéchisme de l'Eglise catholique
263. Quels sont les effets du Baptême?

1262-1274
1279-1280

Le Baptême remet le péché originel, tous les péchés personnels et les peines dues au péché. Il fait participer à la vie divine trinitaire par la grâce sanctifiante, par la grâce de la justification qui incorpore au Christ et à son Église. Il donne part au sacerdoce du Christ et il constitue le fondement de la communion avec tous les chrétiens. Il dispense les vertus théologales et les dons de l’Esprit Saint. Le baptisé appartient pour toujours au Christ : il est marqué du sceau indélébile du Christ (caractère).
Source : Compendium du Catéchisme de l'Eglise catholique
268. Quel est l’effet de la Confirmation?

1302-1305
1316-1317

L’effet de la Confirmation est l’effusion particulière de l’Esprit Saint, comme à la Pentecôte. Cette effusion imprime dans l’âme un caractère indélébile et elle augmente la grâce baptismale. Elle enracine plus profondément la filiation divine.
Source : Compendium du Catéchisme de lEglise catholique
581. Quelle place tient le Notre Père dans la prière de l’Église?

2767-2772
2776

Prière par excellence de l’Église, le Notre Père est « remis » au Baptême et à la Confirmation pour manifester la nouvelle naissance à la vie divine des fils de Dieu.
Source : Compendium du Catéchisme de lEglise catholique
1129 L’Église affirme que pour les croyants les sacrements de la Nouvelle Alliance sont nécessaires au salut (cf. Cc. Trente : DS 1604). La " grâce sacramentelle " est la grâce de l’Esprit Saint donnée par le Christ et propre à chaque sacrement. L’Esprit guérit et transforme ceux qui le reçoivent en les conformant au Fils de Dieu. Le fruit de la vie sacramentelle, c’est que l’Esprit d’adoption déifie(cf. 2 P 1, 4) les fidèles en les unissant vitalement au Fils unique, le Sauveur.
Source : Catéchisme de l'Eglise catholique - DEUXIEME PARTIE LA CELEBRATION DU MYSTERE CHRETIEN - PREMIERE SECTION L’ÉCONOMIE SACRAMENTELLE- CHAPITRE PREMIER LE MYSTERE PASCAL DANS LE TEMPS DE ÉGLISE - Article 2. LE MYSTERE PASCAL DANS LES SACREMENTS DE ÉGLISE : IV. Sacrements du Salut

L'enseignement de l'Eglise est constant

L'enseignement de l'Eglise sur la question du baptême est constant. Les catéchismes officiels actuels sont en accord avec l'enseignement du Concile de Trente. Nous ne remontons pas sur des périodes plus anciennes, Saint Augustin et Saint Thomas d'Aquin par exemple n'enseignant eux-mêmes rien de différent.

On note que le Concile Vatican II, dans sa Constitution Gaudium et Spes, soutient nettement cette doctrine de l'adoption divine par le baptême. Mais, on peut noter déjà la présence sous-jacente de la thèse du chrétien anonyme notamment dans le paragraphe 92, point 5 dans lequel on lit :

4. Nous tournons donc aussi notre pensée vers tous ceux qui reconnaissent Dieu et dont les traditions recèlent de précieux éléments religieux et humains, en souhaitant qu’un dialogue confiant puisse nous conduire tous ensemble à accepter franchement les appels de l’Esprit et à les suivre avec ardeur.

5. En ce qui nous concerne, le désir d’un tel dialogue, conduit par le seul amour de la vérité et aussi avec la prudence requise, n’exclut personne : ni ceux qui honorent de hautes valeurs humaines, sans en reconnaître encore l’auteur, ni ceux qui s’opposent à l’Église et la persécutent de différentes façons. Puisque Dieu le Père est le principe et la fin de tous les hommes, nous sommes tous appelés à être frères. Et puisque nous sommes destinés à une seule et même vocation divine, nous pouvons aussi et nous devons coopérer, sans violence et sans arrière-pensée, à la construction du monde dans une paix véritable.
Le texte adopté est manifestement un accomodement entre deux tendances adverses : la tendance légaliste, qui tenait que le baptême est le seul moyen de salut se confrontait à la tendance progressiste qui affirme toujours que tous les hommes sont frères parce qu'ils sont enfants de Dieu, à moins que ce soit l'inverse (ce qui est aussi faux). On voit ici toute la nocivité des documents concilaires qui sont presque tous et dans presque chacune de leurs parties, le fruit d'attaques des uns et de résistances des autres. on peut y voir des traces partout dans le texte. Si on relit le passage précité de Gaudium et Spes, on doit souligner la phrase : "... le désir d’un tel dialogue, conduit par le seul amour de la vérité et aussi avec la prudence requise, n’exclut personne ...". La formulation "désir d'un tel dialogue" offre toutes les interprétations avec un flou inqualifiable. Devant la chose, qui devait d'ailleurs avoir une substance bien plus précise, lors de la négociation, manifestement les "conservateurs" ne voulaient pas ouvrir ce "dialogue" inarticulé sans se départir de "la prudence requise", tandis que, emportés par leur élan, les "progressistes" tenaient ce "dialogue" "conduit par le seul amour de la vérité". On s'interroge encore sur la portée d'une telle déclaration dans laquelle le "seul amour" doit se doubler de la "prudence requise" ...

On voit à cet exemple combien l'apport du Concile doit être considéré avec circonspection.

Mais, quoiqu'on en pense, l'enseignement de l'Eglise est constant. Seule la conversion personnelle et volontaire permet d'accéder au baptême. Seul, le baptême comme intervention gratuite du Seigneur permet de trouver son Salut.

Les pratiques actuelles du baptême

En France, en 2011, l'Eglise de France baptise 270.000 enfants de moins de 7 an. Au delà de 7 ans, il y a 30.000 baptêmes. Le baptême est donc essentiellement une fête de famille qui se confond souvent avec la naissance. La recherche des rites de baptême sur Internet donne de nombreux documents. Leur caractéristique commune la plus répandue est la quasi disparition du concept de péché. Il faut reconnaître que le dolorisme associé souvent au concept de péché originel est très peu en harmonie avec la cérémonie familiale que constitue la majorité des baptêmes d'enfants. L'idée que le petit enfant rose et joufflu que l'on présente au prêtre soit le "monstre d'iniquité" que laisse imaginer le "péché originel" ne doit pas effleurer le moindre participant à un baptême et, semble t'il, très rarement le célébrant.

A la place, les rituels fabriqués souvent localement par de zélés liturgistes, peu au fait de l'enseignement de l'Eglise, insistent sur la paix, l'amour, la vie, le futur heureux et ce genre de choses. S'il est bien difficile de le leur reprocher. Il n'en reste pas moins vrai qu'ils sont gravement erronnés. Et avec ces errements, l'idée que le baptême est une simple formalité d'accueil dans la communauté "ecclésiale" se répand partout, même si cette "simple" idée se décline souvent sous la forme d'une grandiloquence majestueuse et que nous trouvons hors sujet.

Promouvoir la vérité

Deux questions sont ouvertes :

  1. Faut-il lutter contre les errements concernant le sacrement du baptême ?
  2. Comment diffuser le véritable sens catholique du baptême ?
La réponse à ces deux questions nous parait essentielle pour participer à la promotion de la vérité. Malheureusement, nous pensons que ces réponses sont loin de notre compétence. La première raison, et qui pourrait rester la seule, est que la réponse est réservée à Celui qui parlait avec autorité. L'auteur de ces lignes n'a aucune autorité et n'a jamais été en mesure de parler ainsi.

Lutter contre les errements est une prérogative de l'autorité légitime. Il n'est donc pas question de répondre ici à la première question. Nous savons que si lutte il y a, elle doit ménager la charité. La seconde question a un préalable. Il faut acquérir une science authentique de la Foi. C'est seulement après qu'il est possible de parler. On est loin ici d'y être parvenu.


Revue THOMAS (c) 2013