Afghanistan. La vérité et la mort ...

Afghanistan. La vérité et la mort La valise, instrument d'Etat

Philippe Brindet - 28.04.2013

La Guerre d'Afghanistan est presque terminée et elle est perdue ...

Le New York Times publie le 27 avril 2013 un article intitulé : "Departing French Envoy Has Frank Words on Afghanistan" par Alissa J. Rubin.

Il s'agirait d'une réception donnée par un haut fonctionnaire français à Kaboul à l'occasion de son départ suite à une promotion hollandiste. Nous n'en avons vu aucun écho dans la presse fançaise à l'heure de la rédaction de notre article. Il est pourtant majeur.

Non que nous l'approuvions sans réserve. Mais, ce haut fonctionnaire semble connaître très bien la politique étrangère en général et la situation en Afghanistan, ce qui est loin d'être notre cas.

Toujours est-il que l'impuissance de l'état installé par Washington ne provient pas seulement de son absence de moyens. Il vient de ce que l'adversaire des américains n'a pas été vaincu. Et pas parce que cet adversaire était le "plus fort". Mais parce que ceux-ci se sont trompés d'adversaire !

Ce qu'aurait dit le fonctionnaire français à Kaboul

Constatant le départ des Alliés par petits convois, le haut fonctionnaire estime que la "mission" est loin d'être remplie. Il note que tout le monde au sujet de l'Afghanistan s'est laissé bercé par la douce chanson de la "souveraineté nationale", les politiciens afghans tout autant que les occupants américains et satellites.

Or, nous dit le fonctionnaire français, un pays qui dépend de l'étranger pour payer sa police et son armée, n'est pas un Etat souverain.

Comme de plus l'Afghanistan dépend de l'étranger pour ses investissements d'infrastructures, ...

La "souveraineté" ...

La souveraineté est une notion très relative. Combien de pays européens, France et Allemagne compris, ont été pendant des années entièrement financés par les Etats-Unis notamment à l'issue de la Deuxième Guerre mondiale. La fiction de la souveraineté marchait à plein dans les esprits "gaullistes", pourtant.

On ne voit pas bien en quoi l'Afghanistan de 2013 serait moins "souverain" que la France "gaulliste" de 1945.

... est une faribole qui n'a plus grand intérêt pratique

La souveraineté d'un Etat réside dans sa propension a pouvoir faire n'importe quoi à l'intérieur de ses frontières et presque n'importe quoi à l'extérieur. De ce côté, la France hollandiste est un sommet dans le genre. Il se pourrait que ce soit la même souveraineté qui se mette en place en Afghanistan. Simplement, le haut fonctionnaire ne reconnaît pas dans les haillons talibans le costume trois pièces du haut fonctionnaire français. Alors, il a beaucoup de peine à reconnaître un Etat souverain là où il est contraint de palabrer assis en tailleur avec des homologues barbus et en costume traditionnel.

C'est tout.

L'Afghanistan a probablement été un état toujours souverain malgré les américains ...

L'occupation américaine s'est fondée sur un quiproquo navrant. Parce que les guys incultes et drogués installaient des "check points" aux carrefours de pistes de montagne avec des blindés légers, ils avaient l'impression d'amener l'ordre et la prospérité dans ces régions qu'ils voyaient désertiques seulement peuplées de quelques faméliques barbus au regard de braise.

Voilà le choc : aucun ne reconnaît son autre. Il en déduit que l'Afghanistan n'existe pas.

L'occupation de l'Afghanistan s'est entièrement basée sur une fiction que l'on cherchait à démontrer. Cette fiction est identique à celle des armes de destruction massive que le "tyran" Saddam Hussein préparait évidemment en Irak contre le monde "libre". L'Afghanistan entretenait les bases du terrorisme international. Totale erreur.

Non que celà fut faux. Mais le Pakistan abritait mille fois plus de dangereux terroristes et il bénéficie toujours de l'appui "bienveillant" des Etats-Unis, alors même que ces derniers se sont retrouvés contraints de violer sa "souveraineté" pour exécuter un retraité des réseaux terroristes de la CIA, le fameux Ben Laden que l'on a dérangé pour toujours alors qu'il était paisiblement en train de regarder des cassettes vidéo ...

Alors les peines de coeur d'un fonctionnaire français qui se demande en quoi réside la "souveraineté" de l'Afghanistan nous semblent particulièrement en dehors de la réalité. Oui, la région afghane est aux mains de mafieux qui se distribuent sans vergogne ... le marché du médicament ..., je m'égare, de la drogue. Oui, les politiciens afghans déroutent sans vergogne l'argent de l'aide américaine vers des paradis fiscaux sur des comptes à leur seul bénéfice.

Nous ne voyons pas bien la différence avec un certain ministre d'un certain pays tempéré ... et "souverain".

... Et quelques heures plus tard ...

La presse française se fait l'écho de la même déclaration

Comme quoi nos jugements péremptoires ne jugent que nous-mêmes, quelques heures après avoir publié cet article dans lequel on se moquait de la presse française de ne pas avoir parlé de cette déclaration d'un diplomate français, Le Monde publie un article intitulé Les mots sans concession de l'ambassadeur de France à Kaboul et daté du 29.04.2013 à 07h01.

L'article français ajoute quelques détails sur le discours de l'ambassadeur. Il semble critiquer le départ des Américains, fixé à 2014, en dépit du constat universel que l'état afghan n'est pas prêt. Nous avons quelques difficultés avec cette affirmation. Il est clair que l'état afghan n'est pas comparable à l'Etat tel que les cours de sciences politiques le présente de manière idéologique ou, pour être gentil, théorique. Mais ainsi qu'on va le voir plus loin, les Américains auraient une toute autre visée pour l'Afghanistan.

La presse internationale présente la corruption comme un système politique mis en place délibérément

Un article du New York Time intitulé With Bags of Cash, C.I.A. Seeks Influence in Afghanistan indique le système remarquable mis en place par des services américains en Afghanistan dès avant l'invasion de 2001. Des valises de billets irriguent depuis les succursales de ces services toute la société afghane, depuis les "seigneurs de la guerre", les "talibans" et les fonctionnaires du l'état afghan.

Un autre article du Monde, intitulé Afghanistan, l'argent de la CIA dans les poches du pouvoir afghan du 29.04.2013 à 06h31 reprend sensiblement les mêmes informations quelques heures après leur publication.

Selon diverses sources, il semble que parmi les sources de corruption de l'état afghan se trouvent les Etats-Unis et l'ran. Les raisons positives de cette opération américaine nous échappent complètement.

L'état afghan sera donc un état profondément corrompu et il sera contrôlé par le plus fort des corrupteurs. Voilà probablement la doctrine de la CIA qui semble avoir imposé ses vues au président Obama. Ce dernier semble oublier que le nom du plus grand des corrompus est "corrupteur".

Le titre de l'article a été modifié pour refléter les mises au point.

Revue THOMAS (c) 2013