Le problème de la formation professionnelle et du chômagePhilippe Brindet - 19 septembre 2013Le Nouvel Obs' fait paraître ce jour un article partiel de sa journaliste, Martine Gilson, titrant : "Formation des chômeurs, le scandale !". Ce titre racoleur me semble un petit peu extrême. Parce que s'il l'est, presque tout en France, dès que l'Etat y touche, serait un scandale. Après tout, c'est peut être vrai ... Un rapport critique de la formation professionnelleSe fondant sur un rapport de l'IGAS, une administration de l'Etat qui contrôle certaines autres administrations de l'Etat, elle-même contrôlée par plusieurs autres administrations de l'Etat (à chaque fois que vous lisez le mot "Etat", vous vous levez et vous inclinez la tête en signe de respect), Madame Gilson trouve scandaleux que 1% de l'argent collecté pour la formation professionnelle revienne aux chômeurs. En lisant un peu plus, on voit que 84% de cette somme en revient aux employés. Ca limite la critique. Madame Gilson, très remontée, attaque l'opacité de la myriade d'organismes de formation professionnelle et l'impossibilité pour un chômeur pas formé d'accéder à un cursus de formation, justement parce qu'il n'est pas formé. Elle en déduit que seuls les chômeurs formés pourraient accéder aux emplois. Mais pas plus à la formation. Bon. Formation et chômage, une association malencontreuseIl y a en France une accumulation de dogmes, ou si vous préférez de poncifs ou d'idées reçues qu'il est très maladroit de critiquer. Par exemple, on nous apprend ébaudis, que "de très nombreuses offres d'emplois ne sont pas souscrites", ou encore "que le défaut de qualification d'un employé le conduit plus sûrement au chomage". Avec ces deux idées, on a instillé l'idée que la formation des chômeurs assurerait leur retour à l'emploi. En effet, si des offres d'emploi restent sans demande, c'est que les chômeurs qiui devraient répondre ne sont pas formés pour ces emplois. Et allez, il suffit donc de les former. Les employés non qualifiés ou peu qualifiés sont plus soumis que les autres au chômage ? La réponse fuse : "il n'y a qu'à les former". Le chômage et la formation professionnelle, un champ d'idées faussesMélangées avec l'idée que les gens d'aujourd'hui ne sont pas formés pour les emplois de demain, qu'on lit actuellement sous la forme de "les parents aujourd'hui ne comprennent rien aux emplois de leurs enfants", s'impose l'idée simple que le chômage est provoqué par une qualification ou une formation trop faible. C'est faux. Bien sûr, les braves gens qui détiennent la sagesse des nations, sont persuadés que les sociologues, les latinistes et autres psychologues sont de formation supérieure, mais que la société n'ayant aucun besoin d'eux, ils restent inemployés. Hélas, ça aussi, c'est faux. Non. Nous savons que les étudiants les plus diplômés souffrent du chômage en France presque autant que leurs condisciples restés illettrés. Combien de docteurs en pharmacie, en biologie sont actuellement au chômage et tentent des reconversions à l'aide de formations de plombier, ou de fleuriste. Les plus paresseux préfèrent émigrer. La littérature sur le chômage des diplômés en France est immense. On pourra se reporter à Jean Fabbri, Directeur de la faculté des sciences et techniques de l’université de Tours dan sun article publié sur Libération du 20 septembre 2013 et intitulé Impasses pour l’enseignement supérieur. Il écrit avec une rage froide : Les universitaires peuvent témoigner de la souffrance de ces milliers de jeunes tout juste diplômés qui se réinscrivent à d’autres cursus en espérant au mieux une insertion professionnelle, la possibilité d’un stage ou bien seulement le bénéfice d’une couverture sociale minimale.Les gens fortement diplômés le sont parce qu'ils ne trouvent pas de travail ! Un employeur en France recrute essentiellement quelqu'un qui a déjà fait le travail pour lequel il le recrute. Et de préférence il recherche un demandeur d'emploii qui soit moins qualifié que lui, de façon à ne pas lui faire trop d'ombres. Jeunes qui cherchez à briller à l'entretien d'embauche, vous avez bien raison. Mais méfiez-vous. Dans les grandes entreprises, si vous êtes plus brillants que le petit chef qui vous dirigera, il n'a aucun avantage à vous embaucher. A moins qu'il soit de la même école prestigieuse que vous et que votre beau-père quelque chose pour sa cousine Germaine. Maintenant, la formation du chômeur est importante lorsqu'il faut changer de métier. D'autant que la plupart du temps, on l'a déjà dit, l'employeur exige que vous ayez déjà fait la même chose. Ils appellent çà l'expérience. C'est mortel pour l'innovation. Mais c'est la France. |