Il n'y a pas qu'en Corée du Nord ...

Il n'y a pas qu'en Corée du Nord ....

Philippe Brindet - 18 avril 2014

... qu'on fait travailler les prisonniers pour rien.

1 - un cas troublant

Le Figaro de ce jour, dans Vélib' vandalisés : accusé «d'esclavagisme», JCDecaux porte plainte, Par Géraldine Russell, Publié le 18/04/2014 à 09:57, nous informe, goguenard, qu'un groupe gauchiste s'est vanté d'avoir crevé les pneus de 387 vélos de la société Velib' qui loue des vélos sur le territoire de la Maire de Paris.

Or, le public est informé que les dégradations des vélos en libre-service à Paris - et paraît-il ailleurs - menacent la rentabilité de l'opération Vélib' qui paraissait une si bonne attitude "écolo-citoyenne", on se demande encore pourquoi. Les gauchistes dégradeurs de vélo ont revendiquée la dégradation comme une protestation contre l'obligation faite aux délinquants mineurs de réparer les vélos de la société appartenant au groupe industriel JC Decaux à titre de sanction pénale.

La "dégradaction" des gauchistes n'entraîne aucune sympathie de notre part, parce que la destruction ou l'endommagement du bien d'autrui ou même du sien propre nous paraît un désordre coupable. En général, les motivations des gauchistes n'entraînent d'ailleurs qu'une réaction de mépris. Ils n'ont jamais rien compris à tout et ils comprennent le rien.

Cependant, nous sommes troublés que ce soit ces gauchistes qui comprennent la stupidité de notre société et, plus encore, qu'ils soient souvent les seuls à la dénoncer. Dans l'affaire Vélib', le comble de l'absurdité est en passe d'être atteinte par la conjonction de la gogoterie du conformisme écolo-citoyen qui entoure l'affaire Vélib' avec le troublant amalgame des affaires municipales avec les intérêts commerciaux. Le groupe JC Decaux est réputé travailler principalement avec les collectovotés locales et d'avoir tisssés des liens qu'on peut souvent critiquer. Dans l'affaire Vélib', la critique a été aigue, mais, socialisme bien compris, en habillant la chose des oripeaux écologistes et citoyens, elle a paru à tout le monde une bonne chose.

Ce qui apporte le trouble le plus grave est la livraison de main d'oeuvre gratuite à la société gestionnaire de Vélib' d'une main-d'oeuvre en réalité privée de liberté et privé de tout revenu de son activité. Que l'on comprenne bien. Il ne s'agit pas d'un travail rénuméré par des prisonniers qui peuvent ainsi se cosntituer et une exprérience professionnelle et un modeste pécule en préparation de leur sortie. Non, il s'agit d'une peine, dite de substitution, qui évite les frais de la prison à l'Etat.

Selon un article antérieur du Figaro intitulé Vélib': «réparation pénale» pour les mineurs qui dégradent, Par Philippe Romain 1, Publié le 06/01/2013, une convention entre la Mairie de Paris, l'administration de la Justice et le groupe JC Decaux devait permettre de faire travailler à la réparation des vélos par les mineurs dégradeurs eux-mêmes. Aujourd'hui, il semble que la mesure ait été étendue.

Faire travailler un mineur paraît contraire à son obligation de scolarisation et plus encore aux Traités internationaux de droit de l'homme. Qu'un adulte laisse croire que le travail puisse être une peine réparatrice d'un forfait montre assez l'état lamentable de la morale politique. Que ce travail forcé profite de plus à un intérêt commercial, fut-il assis sur un prétendu service public, ne rachète aucune qualité à cette chose détestable.

Une autre chose peut préoccuper. C'est le constat du fait que de nombreuses personnes ne bénéficient pas d'un travail. Et de constater que de niombreuses entreprises, notamment de très petites entreprises, n'ont aucun accès à un marché aussi sûr que celui des services publics et assimilés. Ainsi, la réparation de vélos fussent-ils de l'entreprise du groupe JC Decaux, pourraient très bien intervenir pour un prix modique, bien que juste - c'est-à-dire permettant d'en vivre à celui qui le réalise - sur un travail utile. La réparation des vélib' pouvait très bien se confier avec un grand profit social à ces très petites entreprises que l'on insulte en donnant leur travail à des gens sans foi ni loi comme punition.

2 - Le scandale de la réparation pénale

La peine pénale est conçue, d'un point de vue, comme une menace destinée à écarter l'individu de son projet de forfait et, d'un autre point de vue, comme une réparation du dommage causé à la société - on pourrait parfois même parler d'une vengeance de la société victime. On sait ce qu'il faut penser du premier point de vue. Son effet est quasiment nul. Quant au second point de vue, il est extrêmement problématique. La réparation en effet profite essentiellement à l'Etat. Comme en Chine où le condamné à mort doit payer les deux cartouches qui serviront à le punir, la prison devrait permettre à l'Etat de rentrer dans ses frais en faisant travailler le détenu. Le système n'existe pas officiellement en France. Il est largement mis en oeuvre aux Etats-Unis et dans certaines prisons des Pays-Bas.

Nous pensons qu'il ne s'agit pas d'un traitement humain. La privation de liberté comme peine devrait être la seule mesure pénale, sans qu'il soit besoin de l'accroître d'autres charges. Toutefois, à condition que le lieu de détention soit digne. Ce qui est devenu en France extrêmement rare. On vient d'annoncer que le record de détenus vient d'être battu et le taux de remplissage des prisons françaises est de 130%.

Dans le même temps, on nous informe que les magistrats répugnent de plus en plus à infliger les peines de prison. La question de la peine se pose de manière toujours plus accrue. Et en l'absence d'une véritable pensée politique, les solutions ne sont pas prêtes de se révéler. On va donc longtemps errer dans les expériences stériles ou délétères comme celle de la réparation de vélos par les mineurs délinquants. La pensée politique française est impuissante à comprendre la faute, le délit ou le crime. Elle n'admet que l'acte citoyen à cause de sa médiocrité, de son manque d'originalité.

Les prisons françaises sont remplies de deux catégories importantes de gens :

  1. les individus présentant une pathologie psychiatrique plus ou moins sévère ou bien qu'elle soit acquise par les mauvais traitements infligés par la Police et la Justice aux détenus ou bien qu'elle ce soit développée avant la rencontre de l'individu avec l'institution judiciaire ;
  2. les gens qui ont développé une rebellion à l'encontre du système social à cause de la défaillance des organes et isntitutions qui sont chargés notamment d"éduquer les individus ; en premier lieu ,l'éducation nationale.
Une voie importante de réforme de la société franaçaise passe par la prise en compte de ces deux sources de délinquance. Bien entendu, la prison n'est pas adaptée à ces pathologies sociales.

Le travail forcé encore moins.


Revue THOMAS (c) 2014