Le pape François et les limites de la papamania

Philippe Brindet - 09/07/2015

Le pape François est parti en voyage en Amérique du Sud. A des étudiants là-bas, il demande de faire des études pour aider les autres, pas pour gagner de l'argent. En parfaite sympathie avec Morales, le président bolivien d'extrême-gauche, il reçoir ravi un crucifix composé de la faucille et du marteau des marxistes athées. Dans son encyclique "Laudato si'", il condamne l'approche capitaliste des marchés, pour donner la préférence à une adhésion universelle à la démocratie qui permettra une "véritable" conversion écologique. Et celle-ci refuse la course à la croissance, chère aux finaciers et au capitalisme des marchés.

Le Figaro du 9 juillet 2015, dans son édition fait un sondage sur la question :

Le Pape a-t-il raison de s'impliquer dans les questions économiques et sociales ?
Au bout de 8 heures, le sondage montre 6081 votants se répartissent en 68% de oui et 32% de non. Très clairement, l'orientation gauchiste du pape François plaït aux lecteurs du Figaro, réputé pour son lectorat petit-bourgeois.

Mais, le même jour, Le Figaro, très excité par l'affaire grecque, dans laquelle la Grèce refuse de rembourser sa dette et demande de nouveaux crédits à ses maîtres européens, pose la question suivante :

Faut-il soumettre à un référendum en France une aide européenne à la Grèce ?
Au bout de cinq heures, le sondage montre 48.758 votants se répartissent en 70% de oui et en 30% de non. La question est des plus ambigues. Mais, on comprend que les conservateurs, lecteurs du Figaro, furieux que les Grecs refusent de rembourser leurs dettes - ce qui, pour un bourgeois catholique, est le sommet de l'abjection du péché - répondent Oui à la question et en masse. C'est le cas.

Un seconde remarque se trouve dans la comparaison des deux sondages. Le premier concernant le pape François attire 6000 votants en 8 heures, tandis que celle sur la dette grecque, attire 48.000 votants en 6 heures. Soit, à durées égalisées, un rapport d'intérêt du lectorat de 1 à 10. Mais, le rapport Oui à Non est le même pour les deux sondages; comme si le votant moyen des deux sondages était le même.

C'est-à-dire que ceux qui votent pour dire que le pape François a raison de s"intéresser aux choses économiques estiment que tout doit être fait pour bloquer l'aide européenne à une Grèce trop dispendieuse. Exactement le contraire de l'enseignement du pape François.

Par ces petites choses, on peut percevoir que la sympathie universelle à l'égard des foucades du pape François n'est peut être pas aussi importante qu'on le dit - il a dix fois moins de votants que les affaires d'argent, et que ses supporteurs ne pensent pas forcément comme lui - son supporteur moyen est furieux contre l'évocation d'une quelconque solidarité à l'égard des grecs. Tant s'en faut. Ils croient même au contraire de ce qu'il dit. Et tout le monde se trouve très agréable ...

Faut-il en déduire que les messages brouillons et contradictoires du pape François n'ont aucun effet sur l'opinion publique. Les seuls responsables de la sympathie qu'il suscite encore seraient justement leur caractère bruillon et leurs effets contradictoires.


Revue THOMAS (c) 2015