Conseilleurs de politiciens de droite

Phlippe Brindet - 04.07.2017

Le Figaro du 4 juillet 2016 publiait un article sur le Net intitulé Primaire à droite : derrière les candidats, les «écuries» phosphorent qui affirmait en exergue :

Pour bâtir leur projet, tous les prétendants à l'investiture de droite sont alimentés par des économistes et des chefs d'entreprise de haut niveau.

En matière de politique, le désert, aucun conseilleur. De deux choses l'une. Ou bien les politiciens de droite se considèrent eux-mêmes comme des experts en politique sans besoin de conseilleurs en cette matière, mais alors, on est un peu inquiet de leur besoin en économie, ou bien ces conseilleurs resteraient secrets, et on s'interroge alors sur les bases idéologiques des propositions que ces politiciens de droite sont susceptibles de présenter.

Les conseils économiques des entreprises ?

On retire de ces considérations l'idée que la politique en France, à droite, mais probablement à gauche, est essentiellement limitée au marketing électoral, coincé entre sondages et manipulations médiatiques. Autrement dit, la politique s'arrêterait le lendemain de l'élection ... et l'économie prendrait alors le relais.

Plus encore, l'intervention de chefs d'entreprise en tant que conseillers politiques de candidats de droite paraît politiquement une erreur de casting. Mais bon, admettons qu'ils soient des citoyens comme les autres et que leur intervention auprès de politiciens doit se juger à égalité avec d'autres.

On est un peu éberlué que la spécialité d'un chef d'entreprise soit l'économie à un point si élevé qu'il puisse conseiller un politicien à ce sujet. Nous sommes bien d'accord que l'entreprise du chef d'entreprise intervient dans la pratique de l'économie. Mais alors, une ménagère est largement le chef d'entreprise de la famille qui, par sa consommation, intervient aussi dans la pratique de l'économie. S'il faut de "grandes entreprises", pourquoi le politicien ne demanderait il pas conseil à une mère de famille nombreuse, ou même très nombreuse ......

On se souvient tout de même que le politicien a vocation à diriger l'exécutif de l'Etat français. Et que cet exécutif dispose d'une législation qui règne en maître absolu, en dictateur, de l'économie pratique. Celui qui cherche à se débarrasser de cette tutelle est bien le chef de grosse entreprise. La présence de chefs d'entreprise et même de grosse entreprise, fait donc peser un soupçon de lobbying qui interroge le sens de la démocratie ...

La politique par voix d'experts est vouée à l'échec.

Mais, le recours à des économistes "professionnels" est lui aussi assez perturbant. En effet, chaque "école", chaque chapelle, chaque club d'économistes à des vues si tranchées sur les solutions pratiques des problèmes d'économie réelle que la "guerre" fait rage entre tenants de solutions miracle peut être, mais opposées sûrement. Et l'idée que le "réalisme" du chef d'entreprise conseilleur équilibrerait le dogmatisme de l'économiste théoricien est des plus étranges ...

En matère d'économie, lorsqu'elle doit être perçue par un politicien, on peut estimer que seules des idées simples mais appliquées avec vigueur seraient de nature à porter remède au marasme qui nous détruit. Et seule la politique peut décider quelles idées simples , notamment en matière économique, peuvent être acceptées par le peuple Souverain et lui permettre de bénéficier du bien commun.

Le soupçon que les idées économiques seraient en fait instillées au politicien par des gens qui ont besoin de bénéficier seuls du "bien commun" ou bien pour leur entreprise, ou bien pour la satisfaction de leurs croyances économiques, ruinera la politique. Or, ce soupçon est devenu une accusation largement répandue parmi les citoyens.

L'exigence du retour du politique

Les idées économiques simples ne peuvent être identifiées que par la politique. C'est à elle que le politicien doit se tourner pour trouver les idées simples qu'il proposera de mettre en oeuvre? Pas les idées d'universitaires ou de chefs d'entreprise.

On dira que les idées simples ne font qu'aggraver les problèmes complexes parce qu'elles seraient incapables de résoudre efficacement ces problèmes. Or, très clairement, le problème économique qui se pose à la société française aujourd'hui est d'une gravité inaccoutumée et qui augmente chaque jour. Pourtant, ce que l'Histoire montre, c'est que la complexité n'est pas contrôlée par une action complexe. C'est en regardant les choses de loin que la complexité peut se résoudre en quelque chose de simple. Au contraire, rechercher le détail, demander des avis contraires, se soumettre à des intérêts divergents, voilà le plus sûr moyen du chaos et c'est ce que les politiciens depuis trente ans ont choisi.

Une autre critique contre la simplicité des idées, surtout en matière politique, réside dans le risque du "mirage". Notamment, l'idée simple est suspectée de tromper l'électeur dans une fausse recette en attirant sa sympathie alors que l'idée "simple" cache en fait un motif inavouable. Par ailleurs, les idées "simples" sont suspectées des attitudes du "y-a-qu'à" et du "faut-qu'on" qui suscitent sacarsmes et invectives.

Or, ces griefs ne condamnent pas en soi les idées simples. Ils portent la suspicion sur ceux qui les promeuvent sans contrôle et sans discussion. Or, en matière d'économie, le contrôle doit avoir lieu par la politique et la discussion doit se tenir dans le champ politique et pas dans celui des cercles secrets de conseilleurs, fussent-ils chefs d'entreprise ...

Quelles idées simples en économie devraient donc être promues ?

Ce sont celles qui se trouvent dans la vie quotidienne des gens. Pas de révolution, pas de bouleversement. Mais, des impératifs, des choses graves qui doivent guider la décision politique : la liberté, la justice, la paix.

Qu'est-ce qui, en matière économique, nuit à la liberté, à la justice ou à la paix ? N'est-ce pas le mensonge, le vol, la dilapidation, le chômage, la récession, la contrainte réglementaire. ....

Voilà ce à quoi le politicien qui souhaite se présenter à une élection d'importance nationale doit pouvoir répondre en matière économique. Il ne peut le faire que depuis une appréciation politique pour laquelle il a besoin de conseilleurs. L'économie ? Elle suivra.

Mais, il faut de l'esprit de décision, de l'autorité et un puissant consensus populaire. Sinon, et c'est ce qui se passe depuis trente ans, ce sera la crise ....


Revue THOMAS
04 juilet 2016