Deux curés catholiques démissionnent.

Philippe Brindet - 20.02.2017

Deux faits exemplaires, le même jour

La presse française se fait l'écho du retrait d'un curé d'un diocèse provincial. Le brave homme veut se marier. Il semble que son évêque lui ait fait rencontrer le pape François et qu'ils ont convenu que le prêtre se mettrait à l'écart de son ministère ... Pas sanctionné. Mis à l'écart. Pour que ça ne se sache pas trop fort, pas trop vite.

La presse allemande se fait l'écho du retrait d'un curé d'un diocèse provincial. Le brave homme ne semble pas avoir souci de se marier. Mais il en a marre de "faire le curé". Officiellement pour ces milliers de personnes. En pratique pour quelques dizaines de gamins, dont le dernier contact avec l'Eglise est la catéchèse de confirmation ... Il l'écrit dans un livre. A t'il, comme son confrère français, été envoyé au pape François ? On ne le dit pas. Est il sanctionné ? Il ne semble pas. Au contraire, il manifeste son désir de rester prêtre. Mais à l'écart. Pour que ça ne se sache pas trop fort.

Les deux annonces ont lieu le même jour. C'est un signe qui révèle un mouvement d'accélération de la décomposition du catholicisme romain.

Certains "enragés" estimeront que "les rats quittent le navire" ou encore que "seuls les forts restent attachés à leur vocation". Ils se trompent gravement.

L'Eglise catholique romaine, dirigée par le Vatican, n'a strictement plus rien à offrir au monde. Elle ferme. Il n'y a là rien que de très banal.

Un diagnostic simple

Assez de fumeuses sociologies pour cacher la terrible vérité. Dans chaque Etat occidental, le catholicisme compte à peine quelques milliers de personnes qu'on va appeler ici des fidèles. Par habitude. Les autres sont partis. Et la caste des prêtres qui dirige d'une main de fer l'organisation dont elle estime former l'élite refuse obstinément de se mettre en cause préférant accuser l'individualisme, la perte du "sens du sacré", la sécularisation, .... Uniquement des mots creux qui permettent de publier de pesants livres de réflexions vides.

La stratégie du pape François est claire. Il sait que ses troupes sont devenues squelettiques. Pour conserver son institution sociale, le Vatican, le pape François ne vise qu'une seule voie : accélérer sur la route catastrophique du Concile Vatican II qui est de "s'ouvrir sur le monde". Alors que, en 1962, il s'agissait peureusement "de regarder le monde depuis un vitrail entrouvert", depuis ce temps d'errance, les vitraux ont tous explosés. Les portes se sont effondrées. Le vent a balayé jusqu'à l'intérieur des vieilles églises. Le pluie a ruinées les vieilles pierres et les fidèles ont désertés des édifices croulants devenus dangereux pour ceux qui s'y tenaient encore.

Le pape François a décidé de quitter ses vieilles cathédrales ruinées, ses basiliques effondrées, ses églises ouvertes aux tempêtes, envahies d'orties. Toutes vides, désespérement vides. Il faut selon le pape François ne plus simplement regarder le monde. Il faut bien plus rejoindre le monde dans ce qu'il a de plus dynamique. Et il s'agit bien entendu du monde progressiste.

Déjà, il y a trente ans, les hiérarques catholiques avaient éliminée la charité pour lui préférer une idéologie progressiste, celle de la solidarité. Tout le monde avait bien rit quand de "vieux-croyants" avaient dénoncé cette trahison. Et bien d'autres richesses du christianisme avaient ainsi été remplacées par des concepts idéologiques forgés par le progressisme, par la gauche. Ainsi, l'espérance était depuis longtemps appliquée à celle de l'avénement d'un monde meilleur, plus juste, plus fraternel. Ainsi la foi était depuis longtemps vidée de son contenu chrétien pour être remplacée par la confiance en "l'homme qui peut tout avec l'amour".

L'Eglise catholique romaine, en ce qu'elle est identifiée au Vatican, avec ses filiales mondiales que sont les Conférences épiscopales, et ses filiales nationales que sont les diocèses, est une Eglise vide de sens, vide de croyants, une organisation non gouvernementale qui cherche désespérement à s'approprier l'idéologie de son ancien ennemi, à tromper le plus d'hommes possible en pratiquant cette idéologie progressiste.

Dans le cas de certains catholicismes, comme celui d'Allemagne, l'adaptation de l'Eglise vaticane au monde est absolument vitale pour elle. En effet, si elle perd trop de membres, elle va perdre le bénéfice de l'impôt religieux, la Kirschensteuer, qui lui permet de se maintenir à flot parmi les autres organisations non gouvernementales. Dans d'autres pays, comme la France, la perte de vitesse est déjà engagée de sorte que les revenus du clergé sont extrêmement bas. L'effet est que beaucoup d'ecclésiastiques ne peuvent tenir que parce qu'ils sont aidés par leur fortune personnelle ou par leur famille. La puissance de l'organisation est, dans ce cas, presque nulle.

Un remède unique ?

Il n'existe qu'un seul remède à la situation. La véritable Eglise catholique romaine doit quitter la pleine lumière et la coopération avec le monde. Elle doit retourner dans les consciences de ses baptisés et dans les catacombes de la persécution. Quant à l'Eglise mondaine, celle tenue par le Vatican, elle s'effondre sous nos yeux. Nous n'avons absolument rien à faire. Simplement regarder le grand scandale, rester dehors et vivre de la vraie Foi reçue des Apôtres.

Tout est à reconstruire.

Pas par nous. Dieu y pourvoiera.

Cependant, plusieurs événements laissent percevoir d'autres possibilités. L'ouverture au monde et, plus encore, la collusion avec le monde ont déjà été condamnées, dénoncées par de nombreux fidèles. On peut identifier trois groupes qui oeuvrent avec cette connaissance claire de la catastrophe. Il s'agit :

  1. Des fidèles de l'Eglise concilaire qui, considérant les dérives accélérées du pape François et de ses affidés, découvrent tardivement le problème. Déjà des cardinaux émettent des doutes. D'autres, affirment la foi de toujours face aux hérésies redoublées de ces derniers temps. Leur conscience les guidera.
  2. Des fidèles de l'Eglise concilaire qui, il y a déjà une trentaine d'années, avaient obtenus de Jean-Paul II, et cette permission a été élargie par Benoît XVI, de célébrer la Messe tridentine. Il s'agit des mouvements Ecclesia Dei, comme la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre, dont les fidèles perçoivent clairement que la forme moderne du rite latin emprunte une voie dangereuse. La force de leur culte ancien les entraînera au renouveau de l'Eglise. C'était l'opinion de Benoît XVI qu'il a exprimé clairement dans le motu proprio Summorum Pontificum de 2007.
  3. Des fidèles intégristes, qui dès l'ouverture du Concile, ont eu pleinement conscience de la révolution progressiste, qui minait la Foi et l'Eglise. Il s'agit principalement du mouvement de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X. Ils constituent toujours un roc dans la tempête. A terme, ils produiront plus de prêtres et donc plus de fidèles que l'Eglise vaticane.

Tous ensemble, ces mouvements vont s'animer dans un environnement terrible. Il faut, et c'est absolument vital, qu'ils abandonnent le refuge dans les valeurs du monde du passé au prétexte qu'il serait "non progressiste" ou "non moderniste". Le monde ancien était aussi progressiste que le notre et ce n'est pas parce qu'il y avait alors "beaucoup de fidèles" que le mouvement est véridique. Ce renoncement à la nostalgie du monde ancien est d'ailleurs une condition nécessaire à l'alliance avec les "conservateurs" de l'Eglise concilaire. Ce qui est mauvais, ce n'est pas seulement qu'il soit "moderniste" ou "progressiste", c'est qu'il soit le "monde".

La synthèse se fera autour de la Tradition interne à l'Eglise, dégagée de ses oripeaux conjoncturels ou historiques, ces oripeaux inutiles générés par le lien de la Foi avec le monde d'autrefois.

Va t'on vers un schisme ?

Nous l'ignorons. On peut penser qu'un schisme n'est pas vraiment nécessaire.

Une première remarque tient au problème des "mots". "Hérésie" doit être qualifiée et l'ennemi est bien assez malin pour éviter les critères juridiques ou pour rendre ses actes sujets à polémiques sans fin. Stériles, Epuisantes. Dangereuses. Alors pourquoi agiter des "gros mots" comme "schisme" ou "hérésie" ?

A titre de seconde remarque on peut aussi observer que la faction au pouvoir ecclésiastique est en cours de décomposition. Elle ne représente aucune force politique, ni par elle-même, ni par ses alliances. Par ailleurs, après 250 ans, le progressisme est en fait en perte de vitesse. Ceci est d'ailleurs une autre question qu'il n'est pas possible d'aborder ici. Le mouvement va vers son dépérissement. Il suffit d'être patient.

Le seul problème va être de reconnaître les chrétiens sincères de ceux qui seront seulement les affidés du progressisme. Ainsi que cette vieille rage des étiquettes et autres drapeaux. Les chrétiens en vérité devront se méfier de cette vieille et inefficace rage. La faction progressiste va progressivement s'éteindre, parce qu'elle n'apporte aucune force ni au monde ni au progressisme. Pour un progressiste, pourquoi adhérer à une Eglise qui se prétend progressiste. Il n'y trouvera rien qu'il ne trouvera dans de véritables ONG progressistes comme Green Peace ou Oxfam. S'il veut adhérer à un vieux mouvement, il aura toujours la LCR.

On note la curieuse dénonciation de la position qui est illustrée ici. Selon certains hiérarques, l'opposition entre conservatisme et progressisme serait une "erreur gnostique". Le pape François l'a déjà remarqué et le cardinal Müller vient de le répéter dans un livre récent. Devant l'absence de raison, on peut dire que la qualification est purement verbeuse et ne recouvre rien d'autre qu'un indicible mépris. Celui qui fait demander "Qu'est-ce que la Vérité ?". Mais, toujours est-il qu'il est bon de modérer cette opposition qui peut devenir obsessionelle.

Par contre, il va falloir lutter à la fois contre le monde quand il cherche à éliminer la Foi, et contre la faction progressiste quand elle cherche à réduire le bastion "conservateur". Manifestement, dans cette seconde circonstance, les méthodes de lutte sont à inventer. Un terrain passionnant. L'histoire de la FSSPX sera t'elle éclairante ?


Revue THOMAS
2017