Campagne présidentielle 2017 - Entre deux tours (2)

Philippe Brindet - 02.05.2017

La faribole du gouvernement

Mme Le Pen a déjà "désigné" son "premier ministre", le quasi-inconnu Nicolas Dupont-Aignan, maire d'une petite ville de la banlieue parisienne. M. Macron a dit qu'il choisirait son gouvernement parmi les personnalités qui l'entourent et qui adhèrent à son projet progressiste pour la France. Comme son projet est déjà bien brumeux, sa détermination de son gouvernement est bien indéterminée ... Bien sûr, il y a de nombreux candidats à son gouvernement puisque, selon la presse vendue aux financiers qui font la candidature de Macron, Macron sera certainement élu. Ainsi, on sait que Baroin se voit premier ministre. On sait que Bayrou, Le Maire, Raffarin Lagarde rôdent aussi ... Et Valls aussi ...

Nous n'avons donc aucune idée précise de ceux qui gouverneront la France.

La "nomination" de Monsieur Dupont-Aignan est un simple coup médiatique. Dans la Constitution, le Premier Ministre constitue son gouvernement et le présente au Président de la République Or, Mme Le Pen en est déjà à décider qu'elle renvoit à l'étranger les "fichés S" n'ayant pas "que" la nationalité française .... Quant un président de la république prévoit ce niveau de détail, on voit mal qu'il laissera son "premier ministre" désigner ses ministres ... Et le rôle de premier ministre de Monsieur Dupont-Aignan pourrait être aussi "honorifique" que celui du premier ministre de Sarkozy ... vous savez : un certain Fillon ...

En fait, il est impossible aux deux candidats de beaucoup s'avancer, parce que, pour l'une, c'est le vide intersidéral, et pour l'autre, c'est le "trop-plein" ... Et ils ignorent complètement comment gouverner un Etat qui prend ses ordres à Bruxelles, qui lui-même attend de recevoir ses instructions de Washington ou de New York ... Et toute cette attente pour "gérer" un pays pratiquement en faillite et au bord de l'explosion sociale.

La faribole des Législatives

La campagne présidentielle présente parfois des raccourcis saisissants : "si je suis élu (e) le ...., alors ..."

Les journalistes qui s'estiment très malins - en fait çà arrive souvent ... - posent donc la question sournoise au candidat de savoir avec quelle majorité parlementaire dirigera t'il le pays. Et la réponse de l'un et de l'autre des deux candidats est des plus étonnantes. Ils nommeront les candidats aux législatives qui s'engageront à voter les lois qui vont bien avec le programme du Président de la République. Ce dernier décide donc du programme de gouvernement, il nomme les ministres qui l'exécutent et il nomme les députés de la majorité parlementaire qui aura l'honneur de voter ses lois !...

L'idée que la démocratie moderne est fondée sur le principe de séparation des pouvoirs n'effleure pas un instant ni le candidat Macron, ni la candidate Le Pen. Cela devrait inquiéter. Manifestement, c'est le contraire qui alarme les journalistes ...

Monsieur Macron, interrogé hier soir à ce propos, a lâché que les français n'étaient pas des imbéciles. Il a fait là un pari sur l'avenir ... Un pari qu'un certain Alain Juppé avait lui aussi fait en son temps avec le brillant succès que l'on se rappelle ...

On remarque que rien ne s'oppose à ce que Monsieur Macron soit démenti au niveau des législatives, qu'il se retrouve contraint de gouverner avec une majorité lepeniste ! Et inversement, Mme Le Pen pourrait se retrouver avec une majorité parlementaire mélanchtoniste !

Maintenant, le risque d'une "disparité" de parlement porte beaucoup plus sur Mme Le Pen que sur M. Macron. Ce dernier dispose d'un réservoir inépuisable de gens qui sont prêts à tout pour rester aux affaires. Pardon ! Pour faire valoir leur longue expérience politique ...

Macron inquiète un peu en évoquant des "hommes nouveaux" en politique. Ne recherche t'il pas là des gens qui lui ressemblent, des laquais des banques, des médias et des grandes entreprises dont les patrons l'ont il y a quelques années, l'ont adoubé pour garantir leurs propres intérêts ...

Comment les français peuvent ils faire confiance à cet individu rusé, aux yeux fixes et à la mâchoire serrée. A un homme absolument sans pitié, qui ne compte que le succès et la richesse. La sienne.

En face de lui, Mme Le Pen n'a - à notre opinion - aucune ambition affairiste. Elle n'a aucune introduction connue dans les milieu d'affaire. Ainsi donc l'accès au pouvoir rameutera autour d'elle et des siens tous les affairistes qui, d'un coup, deviendront "lepénistes". Mais, ne peut on pas créditer pendant un bref instant Mme Le Pen et ses amis de leur "naïveté" politique, le temps que les requins des affaires parviennent à eux. Elle et ses amis ont réellement une affection pour le peuple français, cruellement traité dans son propre Etat qu'il a laissé depuis plus de trente ans au pouvoir socialiste, d'un socialisme qui déshonore l'idée même de gouvernement et celle de bien public.

L'absence de projet présidentiel

Les candidats ont des projets assez semblables, alors que la publicité faite autour d'eux donne l'impression que rien ne peut être plus opposé.

Ainsi Mme Le Pen est présumée faire sortir la France de l'Europe au lendemain de son élection, quand Monsieur Macron en serait à créer à Bruxelles un ministère de l'économie avec budget européen et pouvoir dans tous les Etats de l'Union.

Mais, on apprend, presque en "a parte", que Mme Le Pen envisage de demander un référendum pour l'abandon de l'Euro ... Elle est donc loin d'un Frexit. Et presque en même temps, on apprend que M. Macron vient, sur la BBC, de menacer d'un Frexit s'il n'obtient pas de Bruxelles les réformes qu'il exige ...

Les deux candidats ont des programmes électoraux pantagrueliques. Ainsi Mme Le Pen connaît le prochain prix de vente de la baguette de pain et Monsieur Macron sait qu'il fera 60 milliards d'économie - c'était déjà le chiffre de Hollande ... - pour réduire le déficit budgétaire, d'un budget qui est de 1.919,744 milliards d'euros en 2016 .... Ces points de programme sont ils réalistes ? Sont ils réalisables ? Ni l'un ni l'autre, sauf surprise incommensurable.

Ces mesures sont en effet entre les mains, d'environ 2.500 hauts fonctionnaires qui n'ont probablement aucune intention de changer quoique ce soit dans leurs habitudes. Sinon, ils ne seraient plus de hauts fonctionnaires et même Mme Le Pen est restée discrète sur sa capacité de changer de hauts fonctionnaires. Elle a vaguement visé les magistrats ... Quant à M. Macron, ce sont à la fois ses amis et ses maîtres.

Pour cette raison, il est impossible de faire confiance à M. Macron pour changer quoique ce soit et quant à Mme Le Pen, ce n'est plus une question de confiance ...

En pratique, l'agitation d'un "projet présidentiel" pour les deux candidats est simplement un "exercice électoral". Il ne veut rien dire d'autre que : "votez pour moi". Et c'est tellement vain que les candidats préfèrent se vautrer dans l'idéologie.

Et là, pour les présentes élections, nous sommes noyés. Mme Le Pen se veut "nationaliste", ce qui suscite l'horreur chez M. Macron qui nous veut "patriotes". A la mode de 1793 ? Il ne nous le demande pas, mais on y pense ...

Quand un journaliste lui dit qu'elle est héritière de son père, Mme Le Pen réplique qu'elle a rompu définitivement avec son père - qui appelle à voter pour elle. Mais dans le même temps, exaspéré par les ralliements effarés des socialistes et des anciens sarkozystes, M. Macron nous lance qu'il n'est ni de droite, ni de gauche parce que c'est dépassé. Il est "progressiste" ...

Or, le "progressisme" n'est jamais que la qualité "essentielle" du socialisme qui imprègne la société française et particulièrement la politique qu'elle ait été "conduite" par la prétendue "droite de gouvernement" ou par la gauche de pouvoir, fut-elle social-démocrate ou libérale ...

C'est la raison pour laquelle le sort électoral de M. Macron est sensiblement plus confortable que celui de Mme Le Pen.

L'ennui de Mme Le Pen, c'est qu'elle a résolument identifié son fonds idéologique avec l'étatisme socialiste. On en veut pour preuve le nombre important de personnalités come Florian Philipot qui viennent de la gauche socialiste. Et sa référence permanente au peuple est très proche de celle de Mélanchon, qui revendique son lien avec le socialisme robespierriste.

L'absence de légitimité des candidats

Au fond, le problème de ces présidentielles, c'est que, tuées par l'affairisme ou par la commission de catastrophes politiques, sociales ou économiques, aucune personnalité politique n'a plus le moindre crédit en France.

Mme Le Pen n'a aucune légitimité pour diriger le pays. Elle n'a jamais rien fait que ronronner des slogans étincellants qui ont ou bien attirés des électeurs exaspérés par l'absence de perspective économique ou bien suscité les délires vertueux d'abrutis politisés à la plus basse idéologie politique.

M. Macron, outre qu'il a mordu la main qui le nourrissait - Hollande ! .... - est mouillé jusqu'au cou dans la catastrophe politique, sociale et économique dans laquelle le peuple français s'est enfoncé. Conseiller de Hollande, ministre de l'économie, il se découvre d'un coup en moins de six mois un "coeur de présidentiable" ! Propulsé par des moyens obscurs à coup d'articles de presse stipendiés et de sondages fabriqués, il se présente devant les électeurs dans le complet veston de l'agent de banque qui veut faire croire qu'il est le patron, alors qu'il n'en est que le coursier débutant. M. Macron n'a pas plus de légitimité que Mme Le Pen pour se présenter au poste de Président de la République.

D'autant que le Président de la République doit représenter l'ensemble du peuple français. Il ne peut donc que dépasser complètement l'esprit de parti, et susciter une entente par sa seule personne. C'est la raison pour laquelle dans la V° République, le Président ne peut s'inféoder ni à un parti, ni à une idéologie. C'est la raison pour laquelle le Président ne gouverne pas, ne fait pas les lois.

Les seules choses que veulent faire Mme Le Pen ou M. Macron. Dans un esprit de parti, soumis à des idéologies contestables, faire la loi, l'exécuter et contrôler soi-même cette exécution, c'est le programme d'une dictature.

L'Europe, tyran innommable

On ne peut pas dire que l'Europe soit absente du débat électoral. Seulement, sa présence dans le champ politique français est étrange.

Il est clair pour tous - enfion presque tous - que "l'Europoe- l'Europe" n'est plus l'"unique chance pour la France". On espérait il y a trente ans qu'elle maintiendrait au moins la prospérité. Dans le temps de son ascension en puissance, la prospérité de la France s'est évanouie. Plus d'agriculture, plus d'industrie. Des services réduits au tourisme, à la restauration et aux services à la personne ....

Et la plupart des politiciens français parlent à "Bruxelles" comme Chrysale parlait à sa femme Philaminte ...

Mme Le Pen semble avoir compris, presque au pied du mur, qu'on ne "parle" pas comme elle le faisait jusqu'ici à l'Europe. Clairement, elle ne claque plus la porte Elle va ... "négocier". Quoi ? Comment ? Elle ne le dit pas vraiment.

A l'inverse, M. Macron, probablement investi à la présidentielle par "Bruxelles" aussi, en profite pour gonfler ses petits bras musclés de "premier de la classe" menaçant l'Europe qui semble incapable de se réformer. De toutes façons, il fera comme Mme Le Pen, il négociera.

Or, en Europe, on peut toujours discuter. Mais poliment, comme entre gens de la bonne société, et à condition d'obéir.

Et cette tyrannie "participative" est le véritable problème de l'Europe. Aucun des deux candidats ne veut poser le problème, parce qu'il n'en a plus les moyens et que, les aurait-il, il n'y a plus rien à discuter avec une dictature.

La tromperie catholique

Voici une remarque presque sans importance. Le vote catholique - je veux dire spécifiquement catholique - doit toucher environ 400.000 voix, c'est-à-dire, rien.

Au premier tour, on les a vilipendé en disant que les "catholiques" votaient Fillon. Ce dernier battu, on leur joue maintenant la farce sinistre du "danger" de l'extrême-droite que leurs curés leur ont appris à tenir en "sainte horreur", un peu comme les communistes des années 36 ...

Ainsi, on a lu des articles - deux ou trois - intimant l'ordre aux "catholiques" de voter "Macron". Deux de ces articles sont parus dans Le Monde et un autre dans La Croix, ces deux titres appartenant à Pierre Bergé et ses amis qui soutiennent, promeuvent et ont sélectionné Emmanuel Macron. Aussi nous intiment ils l'ordre de l'élire ...

J'estime donc comme une honte de suivre les consignes de vote de pareils individus qui sont simplement des prédateurs de la pire espèce. J'engage les catholiques à ne pas obéir aux consignes de vote émanant de ces cercles en putréfaction. Je n'ai rien de plus à ajouter.


Revue THOMAS 2017