Un nouveau scandale médical : le Levothyrox

Philippe Brindet - 06.09.2017

Le Levothyrox est un médicament pris par trois millions de personnes en France. Il permet de suppléer à une défaillance particulière de la thyroïde en fournissant une hormone thyroïdienne essentielle pour l'ensemble du fonctionnement de l'organisme.

Après un premier incident il y a quelques années (*) - l'Etat avait voulu imposé un générique dont l'excipient rendait malade les malades de la thyroïde - l'Etat vient de recommencer en imposant ce même excipient dans une nouvelle formulation du médicament dénommé "Levothyrox". Il faut remarquer que il ne s'agit pas du tout d'une volonté du laboratoire fabricant le Lévothyrox, Merck Serono, mais, soulignons le, une volonté explicite de l'Etat français, exprimée ici par l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament ANSM.

Selon les informations diffusées par la presse, on peut poser les remarques suivantes :

  1. L'Etat français a remarqué que le Levothyrox n'était pas un médicament stable. Selon notre compréhension de la remarque, il s'agirait de l'observation que la teneur en principe actif du Levothyrox, soit la L-thyroxine, n'était pas stable lors de la durée de vie du comprimé avant d'être ingéré par le patient. Or, clairement, le dosage précis de la L-thyroxine ajoutée par voie médicamenteuse est absolument essentiel pour la santé du patient. Or, avec un Levothyrox avec du lactose sodique comme excipient, le patient ne disposait pas pour une même prise, de la même dose de L-thyroxine pendant toute la durée de la prise des pilules de la boîte qu'il venait d'acheter. L'Etat français prétend que le simple remplacement du lactose par du mannitol suffit à stabiliser la teneur en L-thyroxine.

  2. Lorsque l'Etat français ordonna au laboratoire Merck Serono de changer le lactose en mannitol, ce dernier fut contraint à réaliser un investissement de plusieurs millions d'euros pour changer sa chaîne de fabrication. Il lança la production au début de 2017 et les premières boîtes furent distribuées en avril 2017. Au bout d'un mois, les premiers signalements d'effets indésirables commencèrent à remonter. Aujourd'hui, le "mécanisme" d'alerte, récemment mis en place par le gouvernement hollandiste, est quasiment bloqué par le nombre des plaintes. A un point tel que les spécialistes craignent que non seulement les plaintes ne soient pas traitées selon la procédure obligatoire, mais qu'en plus, les plaintes, pourtant plus rares pour d'autres médicaments, ne puissent plus être traitées.

  3. Lorsque la presse s'empare du scandale peu après le 15 aout 2017, la réaction des autorités médicales fut d'incriminer des réactions psychologiques des patients. La réaction du public fut alors l'exaspération, qui s'exprima par exemple par l'actrice Anny Duperey, qui publie lundi 4 septembre 2017 sur le site de l'Association française des malades de la thyroïde une lettre ouverte à la ministre de la Santé Agnès Buzyn. L'extension de cette exaspération est mesurée par une pétition qui rassemble un nombre extrêmement élevé de protestataires.

  4. Selon les informations recueillies, l'indication du Levothyrox ou des médicaments de cette famille, semble mal comprise par le corps médical. De fait, les seuls patients satisfaits sont ceux dont le médecin a laissé s'exprimer le bien-être, les autres étant seulement contrôlés par des prélèvements sanguins pour tester la TSH, une hormone hypophysaire, et la T4, l'hormone thyroïdienne concernée. Or, d'autres hormones et d'autres corps sont concernés comme la T3, la rT3 et de nombreux autres encore. Ils sont le plus souvent ignorés de sorte que le traitement des pathologies thyroïdiennes est actuellement largement insatisfaisant.

  5. A la différence de cette précédente observation, les autorités de santé - souvent des endocrinologues - font généralement montre d'une assurance désarmante sur leurs choix médicaux, souvent définis par des médecins sans contact avec la clinique, mais qui se considèrent comme des experts au prétexte qu'ils ont été nommé au conseil d'administration d'un laboratoire pharmaceutique ou d'une quelconque institution de santé. Ces autorités de santé ont illustrées cette assurance en se moquant ouvertement des patients se plaignant du changement d'excipient, que ces mêmes autorités de santé considèrent par "principe" comme sans influence.

  6. De ces remarques, on peut déduire que le scandale du Levothyrox est alimenté par plusieurs facteurs. Le premier d'entre eux est l'autoritarisme de l'Etat qui, par ses administrations, prend des décisions qui ne sont pas du ressort de la puissance publique et qui sont prises au mépris du bien de la santé. Un deuxième facteur vient du mécontentement général des malades de la thyroïde du traitement moyen proposé en France par les endocrinologues qui se contentent d'une analyse extrêmement frustre divisant arbitrairement les malades entre hypothyroïdie et hyperthyroïdie selon des critères administratifs de taux sanguins sans aucune validité clinique. Un troisième facteur vient de l'extrême présomption de nombreux spécialistes du secteur qui semblent souvent estimer disposer d'une parole "sacerdotale" dont la contestation par les faits relève du "sacrilège".

Que peuvent estimer les patients souffrant de problèmes thyroïdiens traités par le Levothyrox ? On peut craindre pour eux que leur avis, leur plainte, ne soit enterré dans le grand édredon du respect de l'autorité médicale et de l'autorité de l'Etat. Plus grave encore, il semble que l'inadaptation du traitement "protocolaire" des défaillances thyroïdiennes, pourtant largement avéré, ne bloque pour longtemps les espoirs d'amélioration que les progrès de la science offrent aux patients, trompés, manipulés, et finalement méprisés par le système de santé.

Dans ce sinistre descriptif, il faut souligner cependant l'humanité et le réalisme de nombreux médecins de terrain qui, souvent sans se livrer à des recherches compliquées et matériellement hors de leur portée, sont à l'écoute de leurs patients et recherchent jour après jour à améliorer leur sort. Ils n'en seront jamais assez remerciés.

Notes

(*) Il s'agissait d'un générique du laboratoire Biogaran introduit en 2009 et qui contenait déjà du Mannitol à la place de lactose (https://www.forum-thyroide.net/index.html?https://www.forum-thyroide.net/phpBB/ftopic28397.html) et qui provoqua déjà en 2011 (http://www.forum-thyroide.net/portail-web/le-levothyrox-et-la-levothyroxine-generique/) une protestation des patients à cause de ses effets secondaires. On remarque donc que l'ANMS tient au Mannitol puisqu'elle l'impose au fabricant du médicament "princeps" Merck Serono. On note que l'effet du mannitol sur la stabilité semble plus assurée par l'acide citrique que par le mannitol. Mais ...


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